• Le bataillon de Corée

    Après la défaite du Japon en 1945, celui-ci ne peut plus se maintenir sur la péninsule de Corée qu’il avait annexée en 1910 et contrôlait d’une main ferme. Les vainqueurs, à la Conférence de Yalta, s’entendent pour se partager le monde et, concernant la Corée, se mettent d’accord pour une scission à hauteur du 38ème parallèle (une centaine de kilomètres au nord de Séoul), sous influence russe communiste au Nord et américaine au Sud. Puis, les deux grandes puissances utilisent leur présence militaire pour imposer des gouvernements amis, conformément aux us de la « guerre froide », ce qui conduisit, en 1948, à l’établissement de deux « républiques » distinctes et rivales.

    Le 25 juin 1950, l’armée de la Corée du Nord, fortement « conseillée » par l’URSS, franchit par surprise ce 38° parallèle et bouscule les forces sudistes moins bien préparées. Aussitôt, le Conseil de sécurité de l’ONU se réunit pour prendre une résolution incitant ses membres à porter assistance à la Corée du Sud. C’est le début de la guerre de Corée qui va durer trois ans en faisant inutilement 1,5 millions de morts.

    Les Américains, encore présents au Japon, s’engagent les premiers, bientôt suivis par une quinzaine d’autres Etats, notamment du Commonwealth. Les Français, déjà impliqués dans un conflit en Indochine-Vietnam depuis 1946, sont assez réticents à ouvrir un autre front et ils ne dépêchent sur place, dans un premier temps, que la frégate La Grandière. Mais l’appel timide aux volontaires est un succès sur tout le territoire et un bataillon à quatre compagnies d’anciens combattants, légionnaires ou maquisards de la seconde guerre mondiale à peine achevée, est bientôt constitué. On cherche un chef expérimenté pour commander cette unité disparate lorsque se présente un vieux général de 58 ans, ancien de la 13°DBLE à Narvik, Raoul Magrin Verneret que l’on appelle Ralph Monclar. Il est déclaré trop vieux et trop gradé mais réussit à persuader ses interlocuteurs, qu’avec le simple grade de lieutenant-colonel, il peut prendre le commandement de ce nouveau bataillon français, BF/ONU. Monclar impose alors à ce millier d’hommes un entraînement de fer avant de les embarquer, le 25 octobre 1950, à Marseille en direction du port de Pusan, au Sud-Est de la Corée. Le BF/ONU sera affecté au 23rd US Infantry Regiment de la division américaine « Indian Head ». Moqués et baladés d’emblée par les Yankees, les Frenchies vont s’endurcir et se jurer qu’on les respecterait bientôt.

    C’est le moment où, les Chinois étant venus prêter main forte au Nord, le front entre communistes et occidentaux, après plusieurs allers-retours Nord-Sud, s’est stabilisé à hauteur de Séoul. En janvier 1951, par un temps glacial, les Français tirent leurs premiers coups de feu au lieu-dit Twin Tunnels et, quand les fusils sont gelés, attaquent les Chinois maoïstes à la baïonnette, notamment à Wonju. « Les Français nous ont montré que les baïonnettes n’ont pas été inventées pour ouvrir des boîtes de ration mais pour nous battre » dira le général Ridgway qui a remplacé Mc Arthur, jugé trop radical par Truman. Jusqu’en février, le bataillon français va s’accrocher aux hauteurs du village de Chipyong-ni, face à un ennemi nettement supérieur en nombre. 

    Au printemps, le 38ème parallèle est franchi vers le Nord puis, en octobre, Monclar, le commandant Le Mire et leurs hommes s’emparent de deux côtes stratégiques pour la progression de la division américaine, dont le fameux piton Heartbreaker Ridge, Crèvecoeur,  qui leur vaudra une nouvelle citation honorifique. C’est à Crèvecoeur que Jean Larteguy, officier et écrivain, sera blessé.

    Après une période de repos bien mérité, sous la pluie qui a remplacé le froid, le BF/ONU doit, sous le commandement du lieutenant-colonel Boreill, bloquer une nouvelle offensive chinoise durant l’été 1952, dans le « Triangle de fer ». Pilonnés par l’artillerie, assaillis par l’armée populaire de libération, les hommes de Monclar résistent, tantôt à coups de pelles quand les munitions manquent, tantôt en se portant au secours d’un régiment Sud-Coréen en mauvaise posture à White Horse, ce qui vaudra au chef de section la plus haute distinction coréenne.

    Au vu de ces faits d’armes, les moqueries de début de campagne ont bien sûr cessé et le bataillon sera placé en défensive durant l’année 1953. Lorsque, le 27 juillet 1953, l’armistice de Pan-Mun-Jon est signé, les belligérants s’accordent, après près de deux millions de morts, sur une situation qui revient au statu quo ante bellum.

    Les Français, qui ont laissé presque 300 des leurs en Corée, n’en ont pourtant pas fini car ils embarquent aussitôt pour l’Indochine, formant à Saïgon le Régiment de Corée par adjonction d’autres unités françaises ou khmers jusqu’à la défaite en 1954. C’est alors l’embarquement pour l’Algérie ou le « Bataillon de Corée », est reconstitué.

    Soldats, par votre vaillance, votre courage et votre ténacité, vous avez bien mérité votre badge « Indian Head » à « la tête d’Indien » et vous êtes, comme vous a dit Monclar « prisonniers de votre gloire » !


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  • Commentaires

    1
    Dimanche 26 Octobre 2014 à 11:03
    Un blog qui transmet ...
    Bonjour, un blog qui transmet l'histoire selon le jour de notre histoire présente. C'est vraiment fort intéressant, l'histoire nous rappelle de ne pas faire les mêmes erreurs, une façon de réveiller notre conscience et de ne pas perdre notre temps si précieux à reproduire les actes les plus basiques de l'être humain.
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