• [Critique] Agnosia : un problème de sens

    agnosia

    Titre : Agnosia
    Réalisateur : Eugenio Mira
    Année : 2010, 2011 en France
    Avec : Bàrbara Goenaga, Eduardo Noriega
    Genre : Drame à l'eau de rose avec des méchants dedans



    Comment mal vendre un film? Tout simplement en l'annonçant dans la lignée des magnifiques réussites du cinéma fantastique espagnol des dernières années. Alors déjà, non, Agnosia d'Eugenio Mira (dont c'est le premier film en tant que réalisateur) n'a rien à voir avec des chefs d'oeuvre comme Le Labyrinthe de Pan de Del Toro, L'Orphelinat de Bayona ou Fragile de Balagueró, pour la simple et bonne raison qu'Agnosia n'est en rien un film fantastique. Pas de créatures ni de fantômes içi, mais de l'espionnage industriel croisé avec une histoire d'amour mal barrée, et une héroïne atteinte d'agnosie (en gros, elle a du mal à identifier clairement ce qu'elle perçoit, et ne reconnait donc pas les visages, par exemple).

    Agnosia nous plonge en plein Barcelone de la fin du 19ème siècle, avec ses mystères et ses personnages intriguants. Moi, j'adore les bouquins de Carlos Ruiz Zafón, et on peut espérer retrouver un petit arrière-goût de L'Ombre du Vent à certains moments, avec ces lieux secrets, ces personnages cachés... Esthétiquement, le film est magnifique. Chaque plan a l'air d'avoir été travaillé comme un tableau, les couleurs profitent d'un éclairage superbe, bref, c'est très classe. On y découvre un industriel réputé, qui refuse de commercialier ou même fabriquer une lunette de fusil dont seul lui et sa fille malade (Joanna) connaitraient la formule, ce qui attire les convoitises d'investisseurs pas très honnêtes. Et même pas honnêtes du tout, quand à la mort du père, ils décident de profiter de la maladie de Joanna pour lui soutirer la formule en faisant passer un des leurs pour son futur mari. Agnosia commence très bien, avec plein d'atouts en poche. On s'attend à voir un film inquiétant, machiavélique et manipulateur, profitant de l'innocence d'une jeune fille malade, et toujours aussi beau visuellement.

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    Seulement voilà, ça cloche. Premièrement, le scénario souffre d'incohérences assez handicapantes (pour se dépatouiller avec l'histoire du faux enlèvement, faut y'aller), et surtout, Agnosia devient très vite atrocement gnan-gnan. Forcément, le type qui doit se faire passer pour le futur mari de Joanna se prend au jeu, et ils tombent amoureux l'un de l'autre. A partir de ce rebondissement prévisible, le film se noie dans des répliques frôlant la niaiserie et devient absolument indigeste. Ce qui aurait pu être un thriller machiavélique dérive vers une love-story si maladroitement amenée que même les plus grandes fans de Hugh Grant trouveraient ça trop sucré. Dommage, car avec la musique très orchestrale et sa photographie magnifique, Agnosia donne finalement plus l'impression d'être un film prétentieux et confus, profitant d'un emballage élégant pour masquer le reste. La fin du film est d'ailleurs représentative, se voulant tragique et romantique, elle laisse de marbre. Allez savoir ce qui est too much dans le cumul d'élements suivants : mourir sous la neige qui tombe sur les marches de l'Eglise, à Noël. Manque plus qu'un ange jouant de la harpe à dos de poney. Pas besoin de chercher très loin pour trouver un triangle amoureux finissant de manière bien plus forte : même pays, cette année, Balada Triste d'Alex de la Iglesia. Et hop.

    Agnosia est au final handicapé par les attentes qu'on peut y placer : ce n'est pas un film fantastique (même si les visions de Joanna peuvent être cauchemardesques), et derrière une esthétique séduisante se cachent un scenario maladroit et des scènes parfois trop kitch. On est loin de l'élégance des modèles cités pour vendre le film, mais comme on est cool on dira juste qu'Eugenio Mira a seulement fait preuve d'un peu trop de naïveté, et a tout de même un bel avenir devant lui.

    Note finale : allez, à la louche, 5/10


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  • Commentaires

    1
    Naphtaline
    Vendredi 4 Novembre 2011 à 18:46
    A propos de Hugh Grant
    Je te confirme que le journal de Bridget jones est bien moins niais que ça. D'ailleurs, mis à part l'esthétique, il serait presque bien meilleur pour ses répliques.
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