• PRISONERS

    Synopsis : Dans la banlieue de Boston, deux fillettes de 6 ans, Anna et Joy, ont disparu. Le détective Loki privilégie la thèse du kidnapping suite au témoignage de Keller, le père d’Anna. Le suspect numéro 1 est rapidement arrêté mais est relâché quelques jours plus tard faute de preuve, entrainant la fureur de Keller. Aveuglé par sa douleur, le père dévasté se lance alors dans une course contre la montre pour retrouver les enfants disparus. De son côté, Loki essaie de trouver des indices pour arrêter le coupable avant que Keller ne commette l’irréparable… Les jours passent et les chances de retrouver les fillettes s’amenuisent…

    De Denis Villeneuve avec Hugh Jackman et Jake Gyllenhaal

    Sortie le 9 octobre 2013 

    Interdit au moins de 12 ans

     

    Voilà bien longtemps que je n'avais pas vu un aussi bon thriller, à l'intrigue admirablement écrite et ficelée, à la réalisation efficace, nette et précise, à l'interprétation grandiose ... les accroches publicitaires l'inscrivent dans la lignée des mythiques Seven, Mystic River ou mieux encore Le silence des agneaux, il peut assurément devenir aussi culte que ses célébrissimes prédécesseurs ...  

    Il est signé par l'excellent Denis Villeneuve (le réalisateur de Incendies, film remarquable et multi-récompensé) qui a un sens aigu du cadrage, du placement de caméras et de la profondeur de champ, de la mise en ombre ou en lumière de ses personnages, de la colorisation de son image afin qu'elle soit en total accord avec la tonalité générale du film ... 

    C'est un film sombre, glacial dans toutes les acceptions du terme ... glacial dans sa photographie qui privilégie les couleurs froides (bleu, gris, blanc), dans une météo morose (il pleut et neige ...), dans le cheminement psychologique des protagonistes, dans l'histoire qui vous étreint le ventre et la gorge, dans une atmosphère anxiogène, étouffante, oppressante ... 

    Rien que le titre du film résume à lui seul ce qui se passe tant concrètement que subtilement, métaphore de l'emprisonnement réel, psychologique et psychique de tous : les fillettes retenues quelque part mais où (si l'on n'ose pas imaginer le pire) ... le père enfermé dans son désir de savoir et dans sa haine viscérale envers celui qu'il considère comme coupable ... le flic obsédé dans sa quête de la vérité ... le coupable quasi-autiste qui se protège dans un mutisme déconcertant ... les mères blessées dans leur douleur ... le spectateur aussi est enfermé dans ce qu'il croit avoir deviné alors qu'il se trompe ... (personne ne peut soupçonner l'insoupçonnable) ... 

    Nous sommes emmenés sur plusieurs pistes, dans des labyrinthes complexes dont on ne trouve jamais la sortie ... nous sommes surpris par les rebondissements et révélations ... nous sommes comme pris en otages dans le dilemme du "qui est le plus coupable de tous, celui qui agit ou celui qui réagit ?" ... "la souffrance morale donne-t-elle tous les droits ?" ... 

    Bref tant dans les faits que dans les questionnements qu'il suscite, ce film est une réussite, maîtrisé et abouti jusqu'à une fin qui vous saisit (peut-être légèrement prévisible mais qui se conclut abruptement) ... 

    Qui plus est, il reste froid de bout en bout, de la première à la dernière image, sans jamais tomber dans le pathos ni le gnangnantisme d'un épilogue souvent inévitable bourré de sentimentalisme débordant et de tout le tralala habituel qu'on nous sort à chaque fois pour faire pleurer dans les chaumières ...

    Ici on pleure oui mais pour d'autres raisons qui vous broient à l'intérieur ...

    Et surtout face à des prestations incomparables des deux acteurs principaux (même disons des trois) (toutefois il faut retenir aussi celles de tous les seconds rôles : Viola Davis, Maria Bello, Terence Howard, Melissa Leo).  

    Tout le monde loue l'interprétation magistrale de Hugh Jackman dont on dit qu'il trouve ici le meilleur rôle de sa carrière ... peut-être bien oui ... il transporte avec lui un lourd bagage, il joue avec son cœur, ses tripes, son âme et donne à son personnage une ambivalence captivante ... nous sommes tout à la fois séduits et horrifiés par ses actes dirigés par une haine viscérale ... oui il est plus qu'excellent ... comme toujours oserais-je dire, même si ses prestations passées dans certains blockbusters sont à dix mille lieues de celle-ci.

    Mais personnellement je lui ai préféré, et de loin, celle de Jack Gyllenhaal en flic teigneux, hargneux voire limite torturé ... certaines de ses scènes sont d'une grande puissance, rendues encore plus intenses par son regard incisif et aiguisé, d'un bleu ... glacial .. !

    Cet acteur a pris une vraie épaisseur de film en film, et il a peu à peu développé un jeu riche, intelligent et généreux, d'une incroyable amplitude. 

    Il faut avouer que les deux, face-à-face, nous filent à coup sûr des frissons ... 

    Mais je parle de "trois" acteurs car on ne peut pas ne pas citer Paul Dano ... certes il est en second plan (quoique disons à l'image et sur le papier) mais il délivre une interprétation juste remarquable, exceptionnelle ... il nous fait tout à la fois flipper et pitié ... il est assez fascinant ... 

    Finalement, moi qui ai tendance à fuir les films trop longs, je ne me suis même pas rendue compte des deux heures et demi de projection (chose dont je ne m'étais pas préoccupée et que j'ignorais, et tant mieux car mon choix de film en aurait peut-être été influencé et cela aurait dommage de manquer celui-ci), le générique final a filé et moi j'étais juste scotchée à mon fauteuil et c'est au moment où je suis sortie que j'ai réalisé du temps que j'avais passé dans la salle ... 

    Il laisse un goût de malaise mais un malaise claquant qui vous fait comprendre que vous venez de voir un chef d'oeuvre ... 


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