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Deutéronome 15.1-8. Fêtes des récoltes et d'actions de grâces
Commençons par planter le décor. De l'autre côté du Jourdain, Moïse voit la terre promise. C'est la fin de l'exode. Quarante ans se sont écoulés depuis la sortie d'Egypte ; quarante longues années pendant lesquelles Dieu n'a jamais fait défaut. Toujours il a béni, accompagné, protégé, avec beaucoup de patience ; une patience têtue, amoureuse, obstinée. Et maintenant, la promesse faite à Abraham, Isaac et Jacob va s'accomplir. Les Hébreux, littéralement « les passants » (ceux qui voyagent) vont cesser d'être nomades pour devenir sédentaires. Ils ne seront plus étrangers au milieu des nations, mais fermement établis dans le pays que l'Eternel leur donne en héritage (verset 4). Dieu donne à ce peuple une existence politique, sociale, économique pour mener à bien la tâche qu'il lui a confiée : être le dépositaire de l'alliance et le témoin de sa grâce.
« C'est ta dernière mission, Moïse. Répète la loi à Israël, mon peuple ; adapte-la à sa nouvelle existence ! Qu'il sache bien quelle sera sa mission, et quelles forces je vais mettre à sa disposition ! »
Le patriarche, comme un bon pasteur, commence par mettre Dieu à l'honneur. Pour avancer, l'homme doit d'abord savoir d'où il vient. Pour aimer Dieu et son prochain, il doit connaître l'amour de Dieu pour lui-même. Les premiers chapitres du Deutéronome commencent donc par un résumé de l'histoire collective, un condensé des termes de l'alliance. Au coeur de l'enseignement, bien sûr, on trouve le Décalogue. Craindre et aimer Dieu de tout son coeur est la base même de l'alliance ; l'observation des autres commandements repose sur elle... La suite du livre se présente comme un vaste code civil, un recueil de prescriptions morales, mais aussi juridiques. Tout cela doit préserver et guider le peuple au seuil de l'inconnu.
Le passage d'aujourd'hui se trouve dans cette seconde partie. Le mot « relâche » qui revient sans cesse est un peu passé de mode aujourd'hui. Quand on fréquente les théâtres, on sait que la relâche correspond au repos des comédiens : pas de représentations ce jour-là. Les marins désignent encore par ce mot le lieu où le navire fait escale, le port où l'on peut enfin se reposer.
Ici, c'est Dieu qui ordonne une trêve. Il dit aux créanciers : laissez vos débiteurs tranquilles pendant l'année de relâche. Laissez-les souffler ; n'exigez rien d'eux. Et surtout, veillez à ce qu'il n'y ait pas de pauvres chez vous. Rééquilibrez les richesses ; faites preuve de compassion.
Quand on vote une loi, c'est qu'elle correspond à un besoin. Et quand Dieu prescrit quelque chose, ce n'est jamais pour rien. L'homme n'incline pas naturellement à la bienveillance, ni au partage. Son truc, c'est plutôt de travailler sans relâche pour accroître ses biens et son confort.
Est-ce une bonne chose ? Pas toujours. Esaïe, déjà, dénonce le scandale social que provoque la disparité des biens : « Malheur à ceux qui ajoutent maison à maison - dit le prophète - et qui joignent champ à champ, jusqu'à ce qu'il n'y ait plus d'espace et qu'ils habitent seuls au milieu du pays » (5.8). Un réquisitoire que ne renierait pas Arlette Laguiller !
L'Ecclésiaste, en observateur attentif de l'âme humaine, écrit : « J'ai vu que tout travail et toute habileté dans le travail n'est que jalousie de l'homme à l'égard de son prochain » (4, 4). Salomon encore, met en garde contre cette frénésie de la possession : « En vain - dit-il - vous vous levez de bon matin, vous vous couchez tard, et vous mangez le pain de douleur ; Dieu en donne autant à ses bien-aimés pendant leur sommeil » (127).
Cette dernière réplique nous rappelle bien sûr la parabole de ce riche qui l'était beaucoup pour lui-même, mais nullement pour Dieu. Et cette conclusion frappante du Seigneur : là où est ton trésor, là aussi sera ton coeur.
Alors, pour convaincre ses troupes du bien-fondé de la relâche, Moïse replace cette démarche dans l'économie du salut. « Dieu ne vous demande pas de faire cet effort les premiers ; comme un geste vers lui. Dieu ne marchande pas sa bénédiction en échange d'une bonne conduite ! Considérez un instant ce qu'il a fait pour vous. Voyez ce pays qu'il vous donne pour que vous en preniez possession. Il ne vous a coûté aucune peine, alors n'en infligez pas à d'autres ! Il vous le donne tout entier, alors soyez équitables ! Même les batailles que vous aurez à livrer vous montreront de quelle façon Dieu presse l'ennemi ; alors toi, cette année-là, ne presse pas ton prochain » ! Le maître mot, c'est la reconnaissance.
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Et puis, cette année de relâche est la conséquence logique d'une disposition antérieure. L'ordonnance de Lévitique 25, l'année sabbatique. « Pendant six années, dit Dieu, tu ensemenceras ton champ ; pendant six années tu tailleras ta vigne et tu en recueilleras les fruits. Mais la septième année sera un sabbat, un temps de repos pour la terre, un sabbat en l'honneur de l'Eternel » ! Voilà pourquoi ceux qui avaient emprunté n'étaient pas « solvables » cette année-là. L'interruption des remboursements était d'autant plus nécessaire qu'il n'y avait plus vraiment de rentrée d'argent. La terre était au repos et ce qui poussait de soi-même appartenait à tout le monde, en particulier aux pauvres. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais rien que des textes comme ceux-là - qui ne sont pas, à proprement parler... spirituels, devraient rendre muets ceux qui haïssent la Bible ! Où trouve-t-on une législation semblable chez les peuples de l'antiquité ? Qu'ils soient romains, grecs ou égyptiens, où pratiquait-on de telles mesures sociales ? Et quand je pense aux civilisations qui se sont succédé depuis, à la misère des plus pauvres...
Aujourd'hui, d'autres voix que les prophètes dénoncent les inégalités criantes de la société. Le gouvernement français a présenté mercredi un projet de budget 2011 d'austérité pour engager le pays dans un effort sans précédent de réduction de ses déficits record ; parallèlement, 40 groupes réunis dans le CAC 40 cumulent des bénéfices de plus de 100 milliards d'euros. Notre pays frise à nouveau le seuil des 10 % de chômeurs tandis que le groupe Seb délocalise en Chine, Amora en Pologne et Renaud en Roumanie... Gain de productivité, gain de temps...
Dans notre passage, les croyants devaient reconnaître que leur temps appartenait à Dieu. Deux signes forts : la consécration du septième jour, ressourcement pour l'âme après toute une semaine soumise aux besoins du corps. Puis la consécration d'une année sur sept. C'est l'affirmation que le pays, la terre sur laquelle on vit et qui nourrit est un don de Dieu, une faveur de l'Eternel.
Plus insensée encore : l'année du jubilé, tous les quarante-neuf ans - ce qui correspondait à sept fois sept années sabbatiques. Cette année-là, le son puissant du Yobel - la corne du bélier - retentissait partout en Israël, un peu comme les sirènes dans notre pays, chaque premier mercredi du mois. Cette année-là, la loi ordonnait que les hypothèques soient levées, que chacun retrouve sa propriété et les esclaves leurs familles. C'est pourquoi cette année était encore appelée « année de la liberté ».
Il est donc tout à fait naturel que l'annonce du Messie ait été associée à ces temps si particuliers. Pour illustrer les réalités du Royaume de Dieu, le prophète avait à sa disposition toutes les analogies offertes par les années de relâche et de jubilé. Un seul exemple, bien connu : les paroles d'Esaïe que Jésus appliquera à sa personne : « L'Esprit du Seigneur, l'Eternel est sur moi car l'Eternel m'a oint pour porter de bonnes nouvelles aux malheureux ; il m'a envoyé pour guérir ceux qui ont le coeur brisé, pour proclamer aux captifs la liberté et aux prisonniers la délivrance ; pour publier une année de grâce de l'Eternel, pour consoler tous les affligés » (61).
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L'année de relâche. Nous venons d'entendre ce qu'elle était pour Israël. Voyons maintenant ce qu'elle est pour nous, chrétiens.
La plupart des gens savent ce qu'est une année sabbatique. L'expression est entrée dans le langage courant pour désigner une parenthèse dans la vie professionnelle, un retrait volontaire pour s'accorder du repos ou se consacrer à une autre activité. Mais... c'est à peu près tout ce qui reste de connaissance chez nos contemporains. Car la suite, l'aboutissement, le prolongement des lois de Moïse est donné par l'Evangile.
Par exemple, le Nouveau Testament révèle que les prêtres célébraient « un culte, image et ombre des choses célestes, comme Moïse en fut divinement averti lorsqu'il allait construire le tabernacle » (Hb 8.5). Qui est l'incarnation de ces choses célestes ? Paul répond : « C'était l'ombre des choses à venir, mais le corps est en Christ » (Col 2.17) !
Frères et soeurs, ce n'est plus tout les sept ans que Dieu accorde à son peuple l'année de relâche ! « Quand les temps ont été accomplis, écrit encore l'apôtre aux Galates, Dieu a envoyé son Fils, né d'une femme, né sous la
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loi, afin qu'il rachète ceux qui étaient sous la loi, afin que nous recevions l'adoption » (4).
Nous avons dit que le relâche consistait à suspendre les dettes. Or, Paul emploie le terme de rachat : « Dieu a envoyé son Fils afin qu'il rachète ceux qui étaient sous la loi ».
Etions-nous donc les débiteurs de Dieu ? Les paraboles du Royaume nous répondent. Elles comparent la relation entre l'homme et Dieu à celle d'un roi et d'un serviteur endetté jusqu'au cou ! Matthieu rapporte que sa dette est si importante qu'il supplie le roi de la suspendre. Et le roi fait beaucoup plus que cela : il efface son ardoise (18.27) ! Quand Esaïe annonce que le Messie proclamera aux captifs la liberté, et aux prisonniers la délivrance, c'est pour affirmer que la dette immense qui nous séparait de Dieu, c'est notre péché.
Etre criblé de dettes est une situation intenable. On a vu des gens ruinés se supprimer de désespoir. Le Saint-Esprit affirme que la situation - non pas économique, mais spirituelle - des hommes est parfaitement semblable : « Vous étiez morts par vos offenses », dit l'Ecriture.
Dans ces conditions, le rédempteur - littéralement : celui qui annule la dette, qui rachète - ne pouvait venir que d'en haut. C'est pourquoi, poursuit Paul, Dieu « nous a rendus à la vie avec lui, en nous faisant grâce pour toutes nos offenses ; il a effacé l'acte dont les ordonnances nous condamnaient et qui subsistaient contre nous, et il l'a éliminé en le clouant à la croix » (Col. 2.13) !
Un ami Américain m'a raconté que dans sa paroisse, chaque Vendredi saint, le pasteur termine le culte en refermant brusquement, en faisant claquer la Bible. Tout est accompli - clac : comme le marteau d'un commissaire priseur pour marquer la clôture d'une transaction - l'agneau de Dieu a enlevé le péché du monde ! »
Eh bien voyez, le registre comptable de tous nos péchés s'est refermé aussi brutalement à Golgotha. Paul dit : « Dieu a effacé l'acte, en le clouant à la croix ».
Alors oui, la corne du bélier peut sonner, l'année du Jubilée peut être proclamée car toute la Bonne Nouvelle est un chant de délivrance. Jésus dit aux Juifs : « Si le Fils vous affranchit, vous serez réellement libres » et « si quelqu'un garde ma parole, il ne verra jamais la mort ».
Terminons en soulignant que l'année de relâche n'était pas un privilège individuel, mais un bien collectif. Tous, et surtout les pauvres, bénéficiaient du repos par la bienfaisance des plus riches. Moïse écrit : « tu n'endurciras point ton coeur et tu ne fermeras point ta main devant ton frère indigent » (v.7)... Cela me rappelle cette magnifique parole aux Romains, chapitre 13 : « Ne contractez d'autres dettes que celle de l'amour » !
Vous que la liberté de l'Evangile a affranchis, faites-vous serviteurs les uns des autres et de la justice ! Ainsi, personne ne peut dire : je ne sais que faire de ma vie chrétienne ; je ne sais pas comment utiliser les dons que j'ai reçus.
L'hiver approche et nous avons douillettement rallumé notre chauffage. Or nous savons qu'ils seront encore des centaines à dormir dehors dans les rues des grandes villes. Tous les travailleurs sociaux s'accordent à dire que ce qui tue ces gens, ce n'est pas le froid : c'est l'abandon et la solitude. Quelle sera notre réponse à leur solitude ?
Il y a aussi, bien sûr, et la fête d'aujourd'hui nous le rappelle, les besoins immédiats de nos communautés et de la mission. Entretenir les temples, publier des bibles, rémunérer les pasteurs : personne ne fera cela à notre place. Foi et partage se trouvent par exemple réunis dans cette phrase d'une épître : Par Jésus, « offrons sans cesse à Dieu un sacrifice de louange, c'est-à-dire le fruit de lèvres qui confessent son nom. Et n'oubliez pas la bienfaisance et la libéralité, car c'est à de tels sacrifices que Dieu prend plaisir ».
Que notre désir d'accomplir le bon plaisir de Dieu, et la grâce de notre Seigneur Jésus-Christ, fassent de nous des chrétiens solidaires pour être conduits ensemble vers le temps de relâche par excellence, l'éternité sabbatique auprès de Dieu, notre sauveur ! Amen !
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17°Trinité : 1 Timothée 2.1-6
Frères et soeurs, dimanche dernier, nous nous sommes attardés sur la situation désespérée d'Israël et la prière efficace de Moïse. Ce matin, l'apôtre nous encourage à prier pour tous les hommes, et particulièrement pour tous ceux qui exercent l'autorité. Je sais bien que certains prieront dans la douleur et d'autres dans la joie, mais il y a manifestement un terrain sur lequel nous devons tous nous retrouver, c'est celui de la prière ! Pourquoi ce rappel ? Paul nous donne une triple réponse. Priez : parce que c'est la volonté de Dieu ; parce que le monde en a besoin ; parce que notre salut et celui de nos semblables en dépendent !
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« J'encourage avant tout - écrit l'apôtre - à faire des demandes, des supplications, des prières de reconnaissance pour tous les hommes ».
Cela peut sembler étrange de dire à un enfant : parle à ton père ! Ne fait-il pas cela spontanément ? Un enfant parle à son père parce que cela répond à un besoin profond et vital ; c'est le signe de son amour et de sa confiance. Pourtant, Paul est obligé de dire à son disciple : « J'encourage » et il ajoute même : avant tout. Ailleurs, il insiste au point d'ordonner aux chrétiens : « Priez sans cesse ! » (1Th 5.17).
Nous sommes enfants de Dieu. Dieu veut donc vivre en communion avec nous, comme un père avec ses enfants. Quelle genre de relation avons-nous avec lui si notre prière n'est qu'un automatisme, quelque-chose qu'on accomplit comme une formalité, quand il reste un peu de temps à la fin d'une journée, un truc de dernière minute avant d'aller se coucher et d'éteindre la lumière ? Dieu nous a créés pour la prière et attend que nous priions. Et c'est bien à cause de notre faiblesse qu'il nous le rappelle de cette façon. Vous savez, c'est un peu comme l'adolescent mal dans sa peau qui a du mal à communiquer avec ses parents - avec ses « vieux », comme disent les jeunes - justement parce qu'ils ont le sentiment de ne plus être sur la même longueur d'onde ! C'est à eux que le Seigneur demande : « Invoque-moi au jour de la détresse ; je te délivrerai et tu me glorifieras » (Ps.50.15). Alors prions, frères et soeurs. Prions avec ferveur, s'il est vrai que Dieu compte dans notre vie et que nous avons des choses à lui dire !
Quand cela va mal dans le monde ou dans la vie des gens, on entend souvent des réflexions du genre : « C'est comme ça ! On ne peut rien y changer. Il faut accepter ! Il faut faire avec, prendre les choses comme elles viennent ». Ce qui correspond à peu près à l'Inshala des Musulmans. Les chrétiens abordent le problème autrement. Ils disent non pas Inshala, mais : « C'est toi, Eternel, qui es notre Père, qui dès l'éternité t'appelles notre Sauveur ! » (Esaïe 63.16).
« J'encourage avant tout, dit Paul, à faire des demandes, des supplications, des prières de reconnaissance pour tous les hommes ».
La prière, frères et soeurs, c'est donc le baromètre de notre foi, un peu comme la qualité du dialogue entre époux est le baromètre de leur amour. Et Dieu sait que se parler est important, et même capital. C'est pourquoi l'apôtre ajoute : « Voilà ce qui est bon et agréable à Dieu, notre Sauveur ».
II
« J'encourage à faire des demandes, des supplications, des prières de reconnaissance pour tous les hommes ».
Si l'apôtre Paul dit cela, c'est aussi parce que le monde en a bien besoin.
On entend dire quelquefois que les chrétiens sont déconnectés du monde ; qu'ils ne s'intéressent pas aux problèmes de la société et ne savent que prier. Pour dire une chose pareille, il faut ne jamais avoir assisté à un culte ! Quand les chrétiens sortent de leur appartement ou quittent leur maison le dimanche matin, ils emportent le monde et les hommes avec eux, dans leur coeur, et les présentent au Seigneur.
Ce qu'ils ont vu et appris à la télé, ce qui a fait irruption dans leurs foyers, les malades et les mourants, les gens seuls et en souffrance, les détresses grandes et petites, ils les portent avec eux quand ils se tiennent devant le trône de leur Dieu. Ils prient, parce que le monde en a besoin. Et qui le fera à leur place ? Le joggeur du dimanche ? Celui qui trime tous les week-ends pour retaper sa maison de campagne ? Ou celui qui reste tout simplement sous sa couette parce qu'il a refait le monde le samedi soir autour d'un repas bien arrosé ?
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On entend dire aussi : « les chrétiens parlent beaucoup mais agissent peu ». C'est archi-faux ! Les chrétiens sont des gens de prière, mais aussi des gens d'action ! Ils agissent, mais avant d'agir ou en même temps qu'ils agissent, ils parlent. Et pas avec n'importe qui. Ils parlent avec l'Eternel des armées qui gouverne toutes choses. Ils vont le trouver, car ils savent que s'il en est un qui peut résoudre les problèmes de ce monde, c'est bien lui !
Se bouger, faire face, agir, secourir par le geste ou par le don, tout cela est nécessaire et les chrétiens ne sont pas les derniers à le savoir. Mais ils savent aussi qu'il y a encore plus important que cela, quelque chose qu'ils sont les seuls à pouvoir faire : prier pour ce monde.
Pensons à la faim en Afrique ou en Asie. Faut-il prier au lieu d'agir ? C'est une fausse alternative ! Les chrétiens font les deux : ils prient et ils agissent. Car il ne suffit pas d'agir. Encore faut-il que nos dons parviennent à la bonne adresse au lieu de remplir les poches des puissants, d'alimenter des comptes secrets dans des paradis fiscaux ou de se muter en belles Mercedes, alors qu'ils devraient se transformer en riz pour nourrir des bouches affamées ou en médicaments pour soigner des malades.
Et puis le meilleur riz, le meilleur pain du monde ne peut secourir les malheureux si celui qui crée le riz et le blé ne bénit ces fruits de la terre. Dieu seul rassasie les hommes et les animaux. Alors n'oublions pas d'agir, mais aussi de prier et de prier avec ferveur, d'en appeler au coeur et à la miséricorde du Seigneur !
Un père, c'est aussi un confident, un ami sur lequel on peut compter. Et ça c'est un trésor immense. Peut-être n'es-tu pas très heureux dans ta vie de couple, peut-être y a-t-il des tensions et des querelles dans ta famille, peut-être vis-tu dans la solitude. Ou bien tu as le sentiment d'être mal compris, l'impression qu'on t'ignore ou te méprise. Ou alors c'est le poids des années qui te fait souffrir. Cela ne va plus comme jadis. Il y a tant de choses que tu aimerais faire et que tu ne peux plus faire. Joins les mains, frère ou soeur ! Trouve un peu de temps pour t'adresser à celui déclare dans l'Evangile, à travers ton baptême et dans la sainte cène : « Je t'aime et je ne t'abandonnerai pas ! »
Ne dis pas : « A quoi bon ? Cela ne sert à rien. Dieu ne m'entend pas ! » Fais comme Abraham qui pria pour Sodome : « Seigneur bien-aimé, s'il n'y a que 20 justes dans ses murs, ou seulement 10, ou peut-être 5, épargne cette ville ! »
Ou comme Moïse qui plaça l'Eternel devant ses engagements envers les patriarches et fléchit la résolution divine de mettre un terme à son alliance. Ou comme la femme cananéenne qui insista auprès du Christ et lui dit : « Seigneur, même les petits chiens ont le droit de ramasser les miettes qui tombent de la table de leur maître... », ou encore comme cette veuve qui alla déranger le juge jusqu'à ce qu'il lui fasse justice.
Et puis, comme le dit l'apôtre, prions « pour les rois et tous ceux qui exercent l'autorité, afin que nous puissions mener une vie paisible et tranquille, en toute piété et en tout respect. »
Si vous trouvez que votre situation est difficile dans un pays laïc, pensez aux destinataires de cette épître. Ils ont souffert sous Titus, puis Néron. Les Juifs les méprisent et les Romains les persécutent. Mais quel est l'ordre de l'apôtre ? La révolte ? Non : l'obéissance, « avec amour et respect » comme l'écrit Luther dans son explication du 4e commandement. En effet, les empereurs et les rois, les chefs d'Etat et les gouvernements sont là pour permettre aux gens de « mener une vie paisible et tranquille, en toute piété et dignité ». Ils sont chargés de veiller à la paix, à la justice, à la sécurité et au bien-être de tous. Et si leurs ambitions se heurtent à la mondialisation, aux puissances du profit ou à leur propre incompétence, ils ont d'autant plus besoin de nos prières. D'accord pour la critique, les protestations, les manifestations comme jeudi dernier. D'accord même, si c'est nécessaire, pour faire en sorte qu'ils ne sortent plus des urnes aux prochaines élections. Tout cela peut être parfaitement justifié. Mais qui va prier pour ces gens, si les chrétiens ne le font pas ?
Notre président, notre premier ministre et son gouvernement, nos députés et nos sénateurs et tous les serviteurs de l'Etat relèvent des défis énormes : réduire le chômage, maintenir les retraites, développer la croissance, contribuer par leur politique à la sauvegarde de l'environnement, s'occuper de nos écoles et de nos hôpitaux, veiller à ce que la dignité de chaque citoyen soit préservée, ainsi que son droit à une vie décente. Alors, même s'ils sont bardés de diplômes prestigieux, genre ENA ou Sciences Po, ils ont besoin de nos prières, de beaucoup de prières. Ce ne sont que des hommes, en effet, des hommes faillibles, qui ont leurs limites. Et plus ils sont assis haut, plus grandes sont les tentations auxquelles ils sont exposés. La tentation de rechercher prestige et gloire. La tentation de prélever des commissions sur l'argent qui leur
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passent par les mains. La tentation de vendre leurs faveurs. La tentation de négliger ceux dont ils n'ont rien à attendre et qui ne peuvent pas les faire progresser dans leur carrière ni les maintenir dans leurs fauteuils.
Il est important qu'on prie pour eux. Les tentations auxquelles ils ont à faire face sont tellement plus grandes que celles qui nous assaillent dans notre vie de petits citoyens. Ils portent des responsabilités tellement plus grandes que nous, ce qui signifie que lorsqu'ils font des erreurs, ces erreurs ont des conséquences beaucoup plus graves que les nôtres.
Honorer et respecter ceux qui nous gouvernent ? Certainement, car leur autorité vient de Dieu. Les mettre sur un piédestal et les vénérer ? Surtout pas, car ce ne sont pas des dieux, loin de là ! Les soutenir par un engagement militant ? Pourquoi pas, surtout quand ils le méritent. Mais aussi et surtout prier pour eux, car ils en ont bien besoin et c'est encore la meilleure façon de les aider.
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Prier ? Oui, car Dieu le veut. Prier aussi parce que le monde en a bien besoin. Et enfin prier, car il s'agit de le sauver. « Voilà ce qui est bon et agréable devant Dieu notre Sauveur, lui qui désire que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité - écrit Paul. En effet, il y a un seul Dieu il y a aussi un seul médiateur entre Dieu et les hommes : un homme, Jésus-Christ, qui s'est donné lui-même en rançon pour tous... et pour lequel j'ai été établi prédicateur et apôtre. »
Vous le savez, tous nos problèmes ne sont pas résolus quand nous avons réussi nos examens, trouvé un partenaire pour la vie, construit ou acheté une maison, retrouvé du travail après une petite période de chômage ou surmonté une maladie. Et les problèmes de ce monde ne sont pas résolus quand les pays collaborent et que l'économie est stable et prospère. Il y a un problème qui dans tout cela n'a pas trouvé sa solution. C'est le péché. Le monde a besoin d'être réconcilié avec Dieu. Il a donc besoin de quelqu'un qui le réconcilie, d'un médiateur. Ce médiateur existe : « Jésus-Christ, qui s'est donné lui-même en rançon pour tous ».
Le monde a besoin de salut. C'est la troisième raison pour laquelle il est important que nous priions. Il s'agit de remercier Dieu de ce qu'il nous a donné un Sauveur. De le remercier parce qu'il nous a fait la grâce de croire en lui. De le remercier parce que sa parole nous est prêchée fidèlement. De lui demander d'envoyer des ouvriers dans sa moisson, car le champ est grand et il n'y a que peu de semeurs et de moissonneurs. Demandons-lui d'offrir au monde des pasteurs, des missionnaires, des évangélistes et des diacres dévoués, et beaucoup de fidèles qui travaillent dans son Royaume et ne se contentent pas de voir dans l'Eglise une cafétéria où l'on vient se servir et où on laisse travailler les autres.
Demandons-lui de faire de nous de meilleurs témoins, de nous donner au bon moment les bonnes paroles. Prions pour que les pays qui sont restés fermés à l'Evangile lui ouvrent leurs portes. Prions pour que ceux qui se sont détournés de l'Evangile, qui ne veulent plus ou ne peuvent plus croire, retrouvent la foi, et pour que ceux qui n'ont jamais cessé de croire restent humbles, chaleureux, miséricordieux, doux et patients.
Nous avons beaucoup de raisons de prier, de prier avec ferveur, sans nous lasser. Faisons-le, non par contrainte ni par habitude, mais de bon coeur, humblement, avec foi et gratitude, car Dieu le veut, le monde en a besoin et il y va de notre salut ; du salut de notre mari ou de notre épouse, du salut de nos enfants et de nos petits-enfants, et du salut des hommes nos frères. Dieu est amour. Il veut donc que « tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité ». C'est pourquoi il écoute nos prières. Toutes nos prières ? Oui, toutes. Pas toujours comme nous le souhaitons, mais toujours comme il a décidé de le faire. Et cela devrait nous combler de joie.
Amen !
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16°Trinité Exode 32.7-14
Frères et soeurs, il y eut un jour dans l'histoire de l'humanité où le peuple juif faillit être rayé de la carte et subir une extermination totale...
« Oui, me direz-vous, nous le savons ! Cela s'est passé en Europe, au milieu du XXe siècle. Vous faites référence aux nazis et à la Shoah » ! Eh bien non.
Il s'agit d'un événement très antérieur, puisqu'il nous fait remonter 1300 ans avant le Christ. Voyons comment les Hébreux échappèrent à l'extermination, et cela grâce à la prière d'un homme.
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Rappelons d'abord les faits, même si le récit du veau d'or nous est bien connu. Moïse est sur le mont Sinaï depuis quarante jours. Là-haut, il reçoit du Seigneur toutes les instructions morales et religieuses que nous trouvons encore consignées dans ses livres. C'est la première alliance entre Dieu et les hommes : « observe ma loi, dit l'Eternel, et je ne t'abandonnerai jamais. Bien plus : de toi sortira le Sauveur du monde » !
Le problème, c'est qu'en bas, dans la plaine, « le peuple voyant que Moïse tardait à descendre, s'assembla autour d'Aaron, et lui dit : Allons ! Fais-nous un dieu qui marche devant nous, car ce Moïse, cet homme qui nous a fait sortir du pays d'Égypte, nous ne savons pas ce qu'il est devenu » (v.1) ! Aaron obéit au peuple. Il fit un veau d'or avec tous les bijoux qu'on lui apporta. Puis le peuple offrit à l'idole des sacrifices et des holocaustes. Il organisa une grande fête en l'honneur du nouveau dieu, fête qui dégénéra en orgie.
Alors l'Eternel dit à Moïse : « Je vois que ce peuple est un peuple au cou raide. Maintenant laisse-moi ; ma colère va s'enflammer contre eux et je les consumerai ». Tel est, en résumé, le récit du veau d'or.
Frères et soeurs, ce jugement terrible prouve que l'idolâtrie est une chose grave. Quand les hommes inventent un nouveau culte, ils dirigent vers d'autres leur confiance et leur piété. Dieu ne leur suffit plus. Alors, ils font parler leurs divinités, ils les formatent à leur gré et les entourent d'une religion qui les maintient dans l'illusion ! Au commencement, Dieu dit : « Faisons l'homme à notre image » ! Ici, c'est l'homme qui dit : « Faisons Dieu à notre image » !
Frères et soeurs, Dieu ne veut pas être le fruit de notre imagination. Au contraire : il s'est révélé à nous par ses prophètes. Il dit : à moi seul la louange et la gloire ! Cette relation exclusive, il la revendique car il est notre créateur et notre sauveur. Le premier commandement commence ainsi : tu n'auras pas d'autre Dieu devant ma face. Lui désobéir, c'est tomber sous son jugement.
Mais pourquoi, justement, renier un tel Dieu ? Généralement, c'est pour échapper à sa loi morale : on préfère suivre nos penchants naturels et nos propres désirs. Ce récit nous montre donc le commencement du péché, et d'abord comment il prend très vite naissance dans les coeurs. Il y a à peine six mois que l'Eternel a fait sortir son peuple d'Egypte, en déployant devant lui toute sa puissance... Résultat ? Le peuple désobéit. Cela nous montre que le péché est toujours en nous à l'état latent, et ne demande qu'à jaillir à la première occasion. Ce n'est pas parce que nous avons été au culte ce matin, et que nous avons écouté la parole de Dieu que l'Ennemi ne cherchera pas à nous piéger. Donc, soyons toujours sur nos gardes !
Ici, c'est l'impatience qui provoque le péché. Moïse est en retard. Alors le peuple trouve le temps long. Alors quelqu'un suggère qu'on fasse un dieu qui assure l'intérim. Quel mal y a-t-il à cela ? « Après tout, il est plutôt contrariant, ce Dieu qu'on ne voit pas. Les Egyptiens, pour ça, avaient bien fait les choses : leurs dieux ornaient les temples, l'intérieur des maisons. Ils les sortaient en procession, jusqu'aux rives du grand Nil. On les fêtait... Non, vraiment, les Egyptiens n'avaient pas que des défauts... » ! La revendication semblerait presque légitime : on veut du concret, et vite !
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Mais c'est encore raisonner au ras des pâquerettes ! Dieu est partout et remplit toute chose. Croyons fermement en sa présence, ici et maintenant, en toutes circonstances, et ne cherchons pas le secours en courant d'une religion à l'autre pour voir quelle sera la meilleure. Dieu nous éprouve souvent pour voir si nous tenons vraiment à lui. Nous pêchons souvent par impatience... Et puis... comme on l'a dit, Dieu n'aime pas qu'on se paie sa tête. Et qu'on lui fasse pousser des cornes. Une tête de veau, je vous demande un peu ! Pas étonnant que la vinaigrette lui soit montée au nez !
Aujourd'hui, si tant de gens se font piéger par des sectes et des philosophies à caractère religieux, c'est parce qu'ils doutent du Dieu vivant. Bien souvent, ils ne veulent pas s'en tenir aux réponses de la Bible ; alors ils attendent des réponses qui collent à leurs désirs ou des révélations qui excitent leurs phantasmes et leurs besoins de mystères... Ne dit-on pas d'une chose facile à comprendre qu'elle est d'une simplicité évangélique ? Mais les messages cryptés et les codes secrets sont tellement plus palpitants pour l'intelligence !
Ce récit nous met encore en garde contre une autre séduction : le péché collectif. Il semble que le peuple tout entier persuade Aaron de fabriquer un veau d'or. Un péché collectif est toujours plus séduisant, parce que tout le monde le fait. On se dit : puisque tout le monde le fait, c'est que la majorité a certainement raison. « Et puis, je suis noyé dans la masse : on me verra moins ! » Or, dans l'Eglise, ce n'est jamais la majorité qui a raison. Le seul critère de la vérité, c'est la parole de Dieu.
Aujourd'hui, ce n'est qu'un exemple, le monde pense que toutes les convictions se valent et que personne ne peut affirmer détenir la vérité : l'essentiel est de se montrer sincère ! C'est pourquoi il en résulte tant de confusions au sujet de Dieu et des religions en général.
Ce récit nous montre encore qu'un péché en entraîne souvent un autre. Le peuple s'assit pour « se divertir », raconte Moïse. Le mot en hébreu est plus précis qu'en français. Il évoque généralement les divertissements liés à une sexualité débridée. Paul écrit, en faisant allusion à cet événement (1 Co. 10) : « Ne devenez point idolâtres, comme certains, selon qu'il est écrit : Le peuple s'assit pour manger et pour boire ; puis ils se levèrent pour se divertir. Ne nous livrons point à l'impudicité (l'impudicité, c'est l'immoralité sexuelle), comme quelques-uns d'eux s'y livrèrent, de sorte qu'il en tomba vingt-trois mille en un seul jour. »
On dira : en dansant autour du veau d'or, Israël a peut-être simplement copié certaines pratiques connues en Egypte ! Ce n'est pas une excuse. Voilà un peuple que Dieu s'était donné tant de mal à délivrer de l'esclavage et qui s'adonne à l'orgie en plein air la plus torride de son histoire. A cet instant précis, le peuple élu ne valait pas plus que la plus obscure des tribus païennes...
Frères et soeurs, attention à notre jeunesse, quand elle commence à dire : notre religion est trop rigide ! Ne serait-ce pas plutôt qu'elle les empêche de se divertir avec le monde ? Attention à ce qui se cache derrière de telles revendications ! Trop souvent, on fuit Dieu parce qu'on ne supporte pas d'intrusion extérieure dans nos mauvaises habitudes...
Le péché d'Israël a été extrêmement grave. Notre récit nous dit que, ce jour là, ce fut comme s'il avait changé de Dieu. D'où l'incroyable sanction : l'anéantissement complet du peuple. Israël devait être rayé du plan divin. Et peut-être que si Moïse n'avait pas plaidé en sa faveur, Israël aurait vraiment cessé d'exister.
II
Bien. Justement : comment a-t-il parlé, Moïse ? Et quel enseignement peut-on en dégager, pour nous, aujourd'hui ? Si quelqu'un doute de l'efficacité de sa prière et du pouvoir qu'elle possède, je l'invite à bien écouter ce qui suit ! Nous voyons comment Moïse, par une prière, simple mais fervente, arrête le bras vengeur de l'Eternel ! Il parvient à changer le destin tragique de tout un peuple. Et d'abord que voyons-nous ?
Moïse discute avec Dieu comme s'il était son égal ! Souvenons-nous qu'Abraham avait fait preuve de la même audace quand il défendit Sodome et Gomorrhe.
3
De quel droit le prophète peut-il demander à Dieu de revenir sur sa décision ?
Est-il saint et pur comme le sera Jésus ? Non. Il est pécheur comme le reste des hommes. Sait-il bien parler ? Non. Figurez-vous que Moïse avait un complexe à ce sujet ! Est-il alors un grand prophète ? Certainement, mais c'est Dieu qui l'avait voulu ainsi...
La seule raison, la voici, dans notre récit : « Reviens de l'ardeur de ta colère, dit Moïse, et repens-toi du mal que tu veux faire à ton peuple. Souviens-toi d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, tes serviteurs, auxquels tu as dit, en jurant par toi-même : Je multiplierai votre postérité comme les étoiles du ciel, je donnerai à vos descendants tout ce pays dont j'ai parlé, et ils le posséderont à jamais » !
Moïse est très adroit ; il demande à Dieu de se souvenir du serment qu'il a fait à Abraham, Isaac et Jacob. Et quel est ce serment ? De bénir la postérité des patriarches, que par elle vienne un jour le Christ, le Sauveur.
Voilà le seul grand recours que nous avons devant le tribunal de Dieu : son serment de grâce et d'amour en Jésus-Christ. Voilà la force qui peut le faire changer d'avis, car sa grâce est éternelle.
Donc, si nous voulons bien plaider une cause, ne venons pas avec nos mérites. Ne faisons valoir que l'alliance de notre baptême. Cette grâce nous obtient tout. Elle est la force qui fléchit son coeur. Elle nous permet de lui parler comme le fait Moïse, de lui dire : Tu dois nous bénir, nous pardonner, nous écouter, nous délivrer et nous faire du bien, parce que tu en as fait le serment ce jour-là.
Voilà un bon exemple qui nous montre que nos prières ont un très grand pouvoir sur le coeur de Dieu. Au point de le faire changer d'avis. C'est ainsi, oui, qu'Abraham a prié en faveur de son neveu, que Jacob a obligé l'ange de l'Eternel à le bénir, que la Cananéenne a contraint Jésus à lui faire don de sa grâce. Et surtout, frères et soeurs, ne disons pas : Il faut être grand comme Moïse pour obtenir de si grands résultats. Non ! Si nous sommes en Christ, nous sommes grands comme Moïse ! Nous avons sur le coeur de Dieu le même pouvoir.
Et les sujets d'intercession sont nombreux ! Pour l'enfant révolté, le fils qui a mal tourné, l'époux qui s'est égaré, le membre de l'Eglise qui a perdu la grâce. Prions pour eux, que Dieu détourne sa colère et leur accorde un temps supplémentaire de patience !
Ce récit nous montre encore autre chose. Moïse est seul contre tous. Quand on est seul, on se sent terriblement petit et démuni. Mais quiconque fait comme Moïse, quiconque se réfugie en Dieu n'est jamais seul. Il est même plus fort que tous, comme Moïse l'avait été contre Pharaon et toute son armée, ou comme David face au géant Goliath. Voilà une belle raison de prier si nous voulons rester forts contre les menaces de ce monde. Voilà ce qu'il faut rappeler à notre jeunesse, lorsqu'elle est effrayée par son avenir. Prions, et Dieu nous rendra plus forts !
Enfin, cette histoire rappelle combien Moïse tenait à l'honneur de son Dieu.
Il demande : « Pourquoi les Égyptiens diraient-ils : C'est pour leur malheur qu'il les a fait sortir, c'est pour les tuer dans les montagnes, et pour les exterminer de dessus la terre » ?
Le prophète semble dire : Ne permets pas que les païens se moquent de toi et de ta grâce, en voyant que tu as délivré ton peuple pour son malheur.
Nous aussi, nous devons prier : Seigneur, montre ta force dans notre faiblesse et ton pouvoir à travers ton Eglise, pour que le monde voie combien ta loi est bonne et ta grâce formidable ! Que, par toi seul, Seigneur, beaucoup de gens soient gagnés à l'Evangile. Ne permets pas qu'on se moque de toi et de tes enfants...
Voilà, chers amis, ce que Moïse nous dit, ce matin, de la prière chrétienne.
Son grand pouvoir est disponible pour chacun d'entre vous, efficace en dépit de toutes les causes désespérées de ce monde ! Prions notre Dieu avec audace et ferveur. Et par lui, avec nos simples prières, nous ferons de grandes choses. Amen !
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Chaque année, après les vacances d'été, nous sommes nombreux à reprendre le chemin du travail, et avec le chemin du travail, celui du courage. Beaucoup, en effet, ont vu arriver cette échéance avec morosité. Il faut affronter la sonnerie du réveil, le tram ou les bouchons. Il faut retrouver l'ambiance de l'usine ou du bureau, et la routine de tâches souvent répétitives. Il faut aussi supporter les autres, les employés à problème, le chef pénible ou les collègues désagréables. Et tout cela pour un salaire pas toujours gratifiant. Ajoutez cette année un contexte social très agité où les actifs se demandent bien à quel âge ils pourront prendre leur retraite et dans quelles conditions. Quand on pense qu'il faut passer une partie de plus en plus longue de sa vie à la gagner, cela peut sembler vraiment déprimant. Et déjà on songe aux prochaines vacances...
Alors est-ce que la foi peut m'aider dans mon approche du travail ? Certainement ! La Bible n'oublie pas cet aspect important de notre existence !
Paul nous dit: « Nous vous encourageons, frères et soeurs, à travailler de vos mains, comme nous vous l'avons recommandé. »
Trois réflexions à ce propos : Pourquoi le travail est-t-il souvent si pénible ? Quelle est la volonté de Dieu à ce sujet ? Et enfin quelle motivation trouvons-nous à travailler de bon coeur ?
I
Pourquoi le travail est-t-il souvent si pénible ? Nous n'allons pas faire une étude sociologique sur le travail, sa nature et ses contraintes. Tout le monde sait qu'il faut gagner sa vie et que le travail est nécessaire à la société. Ces trente dernières années, le chômage nous fait même prendre conscience qu'avoir du travail, c'est vraiment une chance, une bénédiction. Dans les pays où le chômage sévit fortement, beaucoup de malheurs l'accompagnent : la pauvreté, la délinquance et la prostitution, les addictions, en particulier à l'alcool, la corruption, le sentiment d'être inutile, et bien d'autres drames à tous les niveaux.
On a beaucoup amélioré les conditions de travail par des lois protégeant l'ouvrier que le gouvernement actuel s'efforce de réformer, par des moyens techniques, par des machines et des outils perfectionnés. Mais le travail reste pénible et le sera toujours. Aucune découverte, aucune amélioration n'échappe à la règle de la contrepartie ; ce n'est pas le travail qui est la liberté : c'est l'argent qu'il procure, hélas ! (G. Cesbron)
Des origines de cette servitude, la Bible dit ceci - c'est la sentence de l'Eternel à Adam : « Le sol est maudit à cause de toi. C'est avec peine que tu en tireras ta nourriture tous les jours de ta vie. Il te produira des ronces et des chardons, et tu mangeras de l'herbe des champs. C'est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, et ce jusqu'à ce que tu retournes dans la terre, puisque c'est d'elle que tu as été tiré. Oui, tu es poussière et tu retourneras dans la poussière » (Genèse 3.17-19). Le Saint-Esprit résume ici notre condition depuis la chute. C'est dans la peine que l'humanité gagne sa vie, aucune nation n'échappe à cette règle. Depuis ce jour, le travail est un combat quotidien pour se mettre à l'abri des privations et de la misère.
Vous remarquerez la pédagogie du Seigneur : la pénibilité du travail doit rappeler aux hommes qu'on ne défie pas impunément son créateur. Le travail met aussi un frein à leur orgueil, en leur démontrant que sans lui, ils ne peuvent survivre. Le travail, comme un éducateur sévère, éloigne ainsi de l'homme trois grands fléaux : l'ennui, le vice et le besoin. Par ce moyen, Dieu attire l'homme à la repentance pour restaurer une relation de confiance et bénir l'oeuvre de ses mains. Car Dieu ne veut pas notre perte mais notre salut.
Voilà pourquoi le travail, qui à l'origine devait être une réelle joie de vivre, est souvent si pénible.
Rentrée - 1 Thessaloniciens 4.10b-12
2
II
On dira peut-être : puisque le travail est si pénible, ne faut-il pas se débrouiller pour y échapper par tous les moyens, y compris les combines malhonnêtes, la paresse ou l'oisiveté ? Pour répondre, voyons maintenant quelle est la volonté de Dieu à l'égard du travail.
Bon... Nous connaissons tous le septième commandement - tu ne voleras pas - et la façon magnifique dont Luther l'explique dans son Petit Catéchisme. Mais ici, dans la paroisse de Thessalonique, il n'était pas question de voleurs ni de brigands...
Savez-vous pourquoi l'apôtre se permet d'avoir un discours plutôt politique - ou social - dans cette épître ? Pourquoi demande-t-il à ces chrétiens de travailler de leurs propres mains, c'est-à-dire honnêtement ?
La Bible, n'est-ce pas, nous encourage à rechercher premièrement le Royaume et sa justice ; elle nous rappelle aussi que la fin du monde peut être imminente et qu'il faut se préparer au retour du Seigneur. Eh bien ! Dans cette jeune Eglise, on en avait tiré la conclusion qu'il fallait renoncer à travailler ! On se servait donc de la Bible pour se mettre en grève et vivre d'amour et d'eau fraiche !
Le Seigneur, c'est vrai, nous a ordonné de compter sur lui et de ne pas nous soucier du lendemain ; mais il n'a jamais encouragé personne à vivre aux crochets des autres, ou à profiter indéfiniment des aides de l'Etat ! Paul revient sur cette dangereuse tendance dans sa deuxième lettre aux Thessaloniciens : « Quelques-uns parmi vous mènent une vie désordonnée : ils ne travaillent pas mais se mêlent des affaires des autres. Nous invitons ces gens-là à travailler paisiblement pour manger leur propre pain. » (2Th 3.11-12).
Et dans notre passage, l'apôtre écrit : « Nous vous encourageons à vous occuper de vos propres affaires et à travailler de vos mains, comme nous vous l'avons recommandé. Ainsi votre conduite sera honorable aux yeux des gens de l'extérieur et vous ne serez dépendants de personne. » (v.11-12). Paul rappelle fermement que Dieu souhaite nous voir vivre honnêtement du fruit de notre travail. Voilà pourquoi nous avons appris un métier, nous avons étudié et faisons étudier nos enfants : c'est non seulement une question de nécessité, mais aussi un devoir conforme à ce que Dieu désire. D'ailleurs, pour être sûr d'être bien compris, l'Esprit ajoute cette conclusion sous la plume de l'apôtre : « Celui qui ne veut pas travailler, qu'il ne mange pas non plus » ! Dont acte !
En même temps, l'Ecriture propose ici une nouvelle orientation à toutes nos activités : puisque les études ou le travail nous coûtent tant d'efforts, puisque nous sommes confrontés à des jalousies et des rivalités, puisque la maladie et le chômage nous angoissent, soyons assurés que Dieu est pour nous un Père plein de bonté ! Après nous avoir rachetés à un si grand prix, il promet de prendre soin de notre vie. Pour preuve cette demande du Notre-Père : Donne-nous aujourd'hui notre pain quotidien ! Alors si nous savons lui demander du pain, remettons-lui aussi tout ce qui va avec ! Que nous soyons patron ou employé, il faut qu'il bénisse notre activité, qu'il nous donne la force, la santé, la joie, l'envie de bien travailler. Tout le monde n'a pas la chance de s'épanouir dans son travail, mais à défaut de faire ce qu'on aime, on peut apprendre à aimer ce que l'on fait.
En apprenant le thème de cette prédication, quelqu'un m'a écrit : « Mon secret ? Voir toujours le don que tu fais aux autres par ton travail ; cela suffit à rendre heureux, et rend secondaire les levers à l'aube, la fatigue et le rythme trépident des semaines. » Le Seigneur peut aussi nous permettre, dans notre manière d'accomplir notre tâche, d'être un exemple de conscience professionnelle. Par la patience qui est un fruit de l'Esprit, il nous aide à supporter les clients ou les chefs désagréables, les collègues agressifs. Il nous donne aussi des coeurs reconnaissants pour lui dire merci : merci pour l'emploi, (quelquefois) pour la garantie de l'emploi, merci pour les avantages sociaux. Il gère même les passages difficiles et nous permet de comprendre que notre avantage n'était peut-être pas dans ce que nous croyons avoir perdu ; Dieu sait aussi nous obliger à ralentir professionnellement, quand
3
il veut absolument nous faire comprendre quelque-chose.
Voyez, mes amis, la malédiction de la Genèse est ainsi, en quelque-sorte, allégée ou transformée pour le chrétien, car si le travail demeure une obligation vitale, Dieu s'engage à nous le présenter sous un jour nouveau.
Les gens voudraient que les choses aillent mieux, et attendent des miracles de la part du gouvernement et des patrons, mais combien veulent faire confiance à Dieu ? C'est pour cette raison que tant de choses vont de travers aujourd'hui.
III
Pour finir, je voudrais parler d'un dernier aspect qui doit nous motiver à travailler de bon coeur. Et c'est vraiment le genre de chose qu'on ne trouve que dans la Bible ! Frères et soeurs, il arrive qu'on se sente inutile dans la vie et même dans son travail ; la routine nous sape rapidement le moral. Dans sa lettre ce matin, Paul écrit qu'il faut travailler pour vivre sans dépendre de personne ; dans l'épître aux Ephésiens, il ajoute une autre dimension : « Que celui qui volait cesse de voler ; qu'il se donne plutôt la peine de travailler honnêtement de ses mains pour avoir de quoi donner à celui qui est dans le besoin. » (Ep 4.28). Génial non ?
J'ai vu dans ma vie beaucoup de manifestations comme mardi dernier où les gens descendent dans la rue pour demander : comment pouvons-nous recevoir plus ? Mais je n'ai jamais vu personne défiler pour demander : comment pouvons-nous donner plus ! Faire ce qui est bien, pour avoir de quoi donner à celui qui est dans le besoin. Voilà la pensée de l'Esprit. Notre liberté, dit Dieu, ce n'est pas uniquement la recherche de notre plaisir personnel, c'est la bienfaisance. « Il y a plus de joie à donner qu'à recevoir » lisons-nous dans Actes 20.35. Nous avons tous expérimenté cela. Dieu nous donne le nécessaire et même le superflu, ou plutôt nous les confie car tout est à lui, pour que nous puissions nous sentir vraiment utiles, en aidant nos enfants, certains membres de notre famille, notre communauté chrétienne et plus largement encore tous ceux qui en ont besoin. Ce serait terrible si je n'exprimais jamais ma reconnaissance à Dieu de cette façon. Par notre bienfaisance, nous mettons un rayon de soleil dans le regard d'un pauvre, un sourire chez le malheureux.
Dieu affirme que celui qui se rend utile aux autres, ne perdra pas sa récompense ; le livre des Proverbes précise : celui qui a bon coeur sera béni. Dieu saura multiplier sur sa tête les fruits du bien-être et du bonheur. Voilà donc une autre belle raison de travailler avec courage et joie.
C'est ce que Paul, apôtre du Christ, voulait nous rappeler ce matin, en cette période où les enfants reprennent le chemin de l'école, et où beaucoup ont repris celui du travail. Voici pourquoi nous devons confier au Seigneur notre métier, notre salaire ou notre pension, notre avenir professionnel ou notre retraite. Il bénira tout ce que nous faisons en nous donnant les forces, la joie et le bonheur. Dieu n'est pas seulement le Dieu de nos âmes et de notre salut éternel, il est aussi notre Dieu au quotidien, avec ses difficultés et ses contraintes ! Comme des enfants bien-aimés, confions-lui tous ces aspects de notre vie ! Il a promis de prendre soin de nous, pour l'amour de Jésus, notre Sauveur. Amen !
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14ème Dim. Après la Trinité Rm 8.12-17
Châtenay 05.09.2010
Chants proposés :
O Seigneur, ta fidélité AeC 36 : 1-3
Nos cœurs pleins de reconnaissance AeC 562 : 1-2
Oh ! prends mon âme AeC 602 : 1-3
12 « Ainsi donc, frères et sœurs, nous avons une dette, mais pas envers notre propre nature pour nous conformer à ses exigences.
13 Si vous vivez en vous conformant à votre nature propre, vous allez mourir, mais si par l'Esprit vous faites mourir les manières d'agir du corps, vous vivrez.
14 En effet, tous ceux qui sont conduits par l'Esprit de Dieu sont fils de Dieu.
15 Et vous n'avez pas reçu un esprit d'esclavage pour être encore dans la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d'adoption, par lequel nous crions : "Abba ! Père !"
16 L'Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu.
17 Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ, si toutefois nous souffrons avec lui afin de prendre aussi part à sa gloire. »
(Segond 21, 2007)
Chers frères et soeurs,
à la fois « enfants » et « héritiers de Dieu » !
Avouez que nous revenons de loin ! Tout à l'heure nous avons confessé - c.à.d. reconnu - nos péchés, reconnu aussi que nous « méritons la juste colère et le châtiment de Dieu dans le temps et dans l'éternité » (Confession des péchés n° 1, Liturgie de l'EELSF).
Et voilà que Paul nous annonce : « Nous sommes enfants de Dieu. [...] Nous sommes aussi héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ » ! (v. 16-17)
Quel retournement de situation ! Que s'est-il passé ? Comment cela se fait-il ? Comment est-ce possible ?
En fait, cela, l'apôtre Paul l'a indiqué dans les chapitres précédents, ce qui a fait de l'Epître aux Romains un livre de base de la Réformation.
Paul y décrit « l'Evangile », le message divin de ce que Jésus a fait pour nous, comme « une puissance de Dieu pour le salut de tout homme qui croit » (Rm 1.16).
Il nous y annonce cette chose merveilleuse : que nous sommes « gratuitement déclarés justes par sa grâce, par le moyen de la libération qui se trouve en Jésus-Christ, » et que cela nous concerne tous, nous tous qui avons « foi en Jésus » (Rm 3.24+26).
« Ainsi donc, déclarés justes » par Dieu « sur la base de la foi, nous avons la paix avec Dieu par l'intermédiaire de notre Seigneur Jésus-Christ », la paix et « l'espérance de prendre part à la gloire de Dieu » (Rm 5.1-2).
Cette merveilleuse réalité, Paul la formule ainsi dans notre texte : Grâce à l'intervention salutaire de Jésus « nous sommes enfants de Dieu » (v. 16), « nous sommes aussi héritiers de Dieu » (v. 17).
Posons-nous alors la question :
C'est quoi, une vie
1. « d'enfant de Dieu » ?
2. « d'héritier de Dieu » ?
X X X 1 X X X
« Nous sommes enfants de Dieu ! »
Cela a-t-il de l'importance dans notre vie ? Cela change-t-il quelque chose à notre vie ? Quand on nous voit, voit-on autre chose que n'importe qui ?
Dans notre extrait de sa lettre aux chrétiens de Rome, Paul parle de notre « manière d'agir » (v. 13) d'enfants de Dieu.
Ah ! bon, nous aurions une « manière d'agir » autre que celle des incroyants ? Les règles de la vie scolaire ne sont-elles pas les mêmes pour tous ? Et celles de la vie sociale, du travail, voire du code de la route serait-elles différentes pour nous ?
Bien sûr que ce sont les mêmes ! Leurs exigences nous concernent de la même manière qu'elles s'adressent aux autres. Mais notre attitude dans la vie, notre attitude face à ces règles, est-elle la même ? Paul, inspiré du Saint-Esprit, répond par la négative.
Il y a une chose qui ne nous distingue pas des incroyants, une chose où, malheureusement, nous, « enfants de Dieu », sommes pareils aux autres : c'est que nous avons la même « propre nature ». Avec cette expression - « propre nature » - notre version de la Bible (la Segond 21) explique ce terme souvent mal compris des anciennes versions : « la chair » (aussi NBS).
« La chair », ce sont nos tendances innées marquées par le péché originel, cette « tendance » naturelle qui nous pousse à aller contre la volonté de Dieu, à agir contrairement à sa Loi, à nous livrer à « la révolte contre Dieu » (Rm 8.7).
Et bien entendu, c'est avec « le corps » que nous agissons, c'est le corps qui est l'instrument de notre comportement.
Avec la langue on peut dire la vérité ou le mensonge, diffamer ou défendre.
Les pieds, on peut les utiliser pour être à l'heure ou pour traîner, pour marcher sur les chemins autorisés, par ex. traverser sur les passages piétons, ou pour aller par des chemins interdits.
Les mains, pour signer une déclaration juste ou non, pour faire un travail honnête ou non, pour donner un coup de main ou un coup de poing.
Le corps, on peut l'offrir en cadeau à son conjoint où le salir en dehors des liens du mariage. Et ainsi de suite.
Paul ne veut pas dire que le corps seul serait affecté par le péché, et non pas l'âme. Ici, il parle de nos agissements. Ce n'est pas l'âme qui agit : elle pousse à l'action. C'est le corps qui agit ; c'est pour cela qu'il parle ici « des manières d'agir du corps ».
Et quand on voit comment il en parle, on comprend que Dieu l'ai choisi pour être son grand apôtre ! Ah ! Paul sait frapper les esprits ! Il a le sens de la formule ! Que dit-il ? - En résumé ceci : « Si vous vivez [...] vous allez mourir, mais si [...] vous faites mourir [...], vous vivrez ! »
Bien entendu, j'ai laissé tomber bien des parties de sa phrase. Pour mieux faire ressortir la façon frappante de parler de l'apôtre. « Si vous vivez [...] vous allez mourir, mais si [...] vous faites mourir [...], vous vivrez ! »
Maintenant, pour vraiment comprendre ce qu'il veut dire, il faut le citer en entier : « Si vous vivez en vous conformant à votre nature propre, vous allez mourir, mais si par l'Esprit vous faites mourir les manières d'agir du corps, vous vivrez. »
« Si vous vivez en vous conformant à votre nature propre, » si vous vous comportez comme si le Saint-Esprit n'avait pas fait de vous des « enfants de Dieu », si vous vous alignez sur le monde en suivant vos penchants pécheurs, vous courrez à votre perte, « vous allez mourir ».
« Mais si, par l'Esprit, vous faites mourir les manière d'agir du corps, » si vous vous placez sous l'action sanctifiante du Saint-Esprit, si vous vous laissez éclairer, animer et diriger par sa Parole, « vous vivrez ».
Car si vous êtes « conduits par l'Esprit », il vous conduira dans une vie de repentance et de foi, dans une vie où vous reconnaîtrez vos torts, vos faiblesses, vos manquements, vos erreurs, bref, vos péchés, mais aussi dans une vie de foi en Jésus-Christ, de foi en son pardon, dans la certitude qu'il vous a réconciliés avec Dieu, qu'il vous a même permis d'être adoptés par Dieu.
Ne vous comportez pas comme si vous aviez « une dette » envers votre nature propre, innée, pécheresse, comme si vous étiez tenus de la suivre dans ses incitations. Non, vous ne lui devez rien.
Mais vous devez tout à Jésus-Christ qui s'est sacrifié pour vous permettre d'être « enfant de Dieu » et de pouvoir, « avec une confiance d'enfant, vous adresser à lui comme des enfants s'adressent à leur père bien-aimé ». (Martin Luther, Petit Catéchisme)
« Nous avons une dette », écrit Paul, mais envers Jésus. Oh ! il n'attend pas que nous la payions. Il sait bien que cela nous est impossible. C'est bien pour cela qu'il a payé de sa personne.
« Nous avons une dette » envers Jésus qui a fait de nous des « enfants de Dieu », à qui nous devons d'être maintenant « conduits par l'Esprit » pour que nous vivions. Nous n'allons quand même pas dire : « Non merci, Esprit Saint, je préfère me passer de toi et aller à ma perte ! » ?
Le dire ainsi à haute voix montre toute l'incongruité d'une telle attitude.
Prions le Seigneur de nous accorder son Esprit avec force pour qu'il nous conduise dans toute la vérité, nous montre le merveilleux de notre condition « d'enfants de Dieu » et ancre en nous la volonté de « faire mourir les manières d'agir » de notre nature pécheresse, pour qu'elles ne nous détournent pas de Dieu et nous conduisent à notre perte, à perdre notre héritage divin, car :
X X X 2 X X X
« Nous sommes héritiers de Dieu ! »
Je vais le formuler autrement : « Je suis héritier du Dieu majestueux et éternel de l'univers ! » Redites-le, chacun pour soi en silence : « Je suis héritier du Dieu majestueux et éternel de l'univers ! » (silence)
Enorme ! non ? Au point de ne pas en saisir toute la réalité, au point aussi de l'oublier souvent au milieu des tracas, des épreuves et autres souffrances - physiques ou morales - de notre vie ici-bas.
L'arbre nous cache parfois la forêt, nos soucis obscurcissent alors notre vision des choses, nos épreuves nous rendent myopes et nous empêchent de voir au-delà des soucis immédiats l'immensité et l'infinie grandeur, la dimension éternelle de notre état « d'enfants de Dieu ».
Il y a trois semaines, le texte sur lequel j'ai prêché lors des obsèques de Didier Nérambourg, contenait ces paroles de Moïse : « Le temps passe vite et nous nous envolons. [...] Enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que notre cœur parvienne à la sagesse. » (Ps 90.10-12)
Ne sommes-nous pas heureux et soulagés que Jésus ait fait de nous ses « cohéritiers », les « héritiers de Dieu » ? Pourquoi alors nous comportons-nous parfois comme si nous ne voulions pas cet héritage, comme s'il nous faisait peur, comme si nous voulions nous contenter de la part de cet héritage qui se situe de ce côté-ci de la mort, comme si nous ne savions pas que nous n'en jouirons pleinement, de cet héritage divin, qu'après la mort ?
Serait-ce parce que nous négligerions de nous laisser « conduire par l'Esprit » (v. 15), parce que nous négligerions de nous laisser remplir de foi, d'amour et d'espérance par sa Parole et ses sacrements ?
Certes, nous ne devons pas négliger cette vie-ci ; nous devons même la considérer comme un précieux don de Dieu. Qu'il est rassurant de pouvoir vivre ici-bas de la grâce de Dieu en Jésus-Christ ! Qu'il est apaisant de pouvoir s'adresser en tout temps à Dieu en l'appelant « Abba ! Père ! » (v. 15) !
Mais la part d'héritage divin dont nous jouissons déjà ici « ne saurait être comparée à la gloire » qui sera nôtre dans l'éternité ! (Rm 8.18) Dans une autre lettre, celle aux Philippiens, le même apôtre jubile : « Christ est ma vie, et mourir représente un gain » (Ph 1.21) ; avec la mort, nous, « enfants » et « héritiers de Dieu », nous gagnons au change !
Car il faut bien l'avouer : de ce côté-ci de la mort, notre héritage divin est encore assombri, non seulement par « notre nature propre » innée, pécheresse, mais aussi par les afflictions diverses que nous sommes amenés à traverser : problèmes d'emploi, difficultés matérielles et financières, problèmes relationnels, deuils, maladies, les symptômes de l'âge. Et puis aussi l'incompréhension, si ce n'est le rejet que l'on peut rencontrer parce que « nous ne nous conformons pas aux exigences » (v. 12) ou à l'état d'esprit du monde incroyant.
Ce n'est pas pour rien que Paul nous exhorte ici à ne pas nous détourner de notre unique Sauveur ! C'est pour que nous ne connaissions pas de grands désagréments.
Ce n'est pas pour rien qu'il nous encourage à « souffrir avec Christ » ! C'est « afin de prendre aussi part à sa gloire » (v. 17), plutôt que de « vivre selon notre nature propre » pécheresse, d'abandonner Christ et de ne jamais connaître ainsi « sa gloire » éternelle (v. 17).
Ne comprenons pas mal ce que Paul nous dit ici. Il ne dit pas que nous nous méritons la gloire éternelle par les souffrances qu'il peut nous arriver d'endurer comme « enfants de Dieu ».
Il dit seulement qu'il vaut mieux garder foi en Jésus-Christ et mener une vie de repentance et de foi, entourés et réchauffés par la grâce de Dieu, même si cela peut entraîner quelques désagréments passagers, plutôt que d'éviter ces désagréments en tournant le passagers$ dos au seul Sauveur que nous ayons.
Ne cessons de plonger nos regards dans l'Evangile de Jésus-Christ ! C'est là que le Saint-« Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. Or, si nous sommes enfants, nous sommes aussi héritiers : héritiers de Dieu et cohéritiers de Christ, si toutefois nous souffrons avec lui afin de prendre aussi part à sa gloire. »
Puisons dans cette merveilleuse nouvelle la sérénité, la joie et la foi dont nous avons besoin pour maîtriser la vie, en attendant la vie à venir dans la gloire !
Amen.
Jean Thiébaut Haessig
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