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Devant linstance de tout le monde pour que je finisse mon blog, je vous livre les derniers billets qui étaient resté dans mon ordinateur. Ma vie est redevenue normale, jai retrouvé mes amis montpelliérains. Je ne savais pas que jen avais autant. Les collègues de bureau, les viticulteurs, le club de course à pied, le cours de théâtre, les amis du père Noël, etc. Je ne pas sortir sans croiser quelquun que je connaisse. Je méclate beaucoup. Jai adopté un chat pour me tenir compagnie dans mes nuits dinsomnie. Dailleurs, je nai plus de nuits dinsomnie. Jai même repris du poids et recommencer un régime. La semaine dernière, je me suis quand même luxée lépaule et jai eu un long mail de Marie et dHélène qui est rentrée en France. La situation au dispensaire ne sarrange pas, bien au contraire. Il y a dix jours, deux nouveaux nés sont morts parce que Félix qui était chargé de mettre de lessence dans le groupe électrogène avait oublié. La situation politique reste précaire mais sept nouveaux missionnaires sont attendus pour le mois de septembre, jespère que ce sera la fin de la galère. Hier jai fait un topo de préparation à mon remplaçant. Ca y est ma mission est fini.
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Et puis comme pour un palud, la fièvre est repartie. Après un mois en France le couperait est tombé, je ne repartirai pas en mission. Ma santé nécessite une surveillance que je ne peux pas avoir en Afrique. Je me suis révoltée, mais je nai pas pleuré, je ne me suis pas énervée, je me suis résignée. Demain je retourne à la vraie vie des vrais gens. Après un mois en Corse auprès des miens, je retourne à Montpellier dans mon appartement que mon locataire a eu la bonne idée de quitter la semaine dernière. Mon ancienne boite ma proposé un poste très intéressants, du genre quon ne peu pas refuser, alors, je ne lai pas refusé. Pendant ce mois en sas de décompression, jai appris à vivre avec la nouvelle moi. Une petite brunette pétillante et vivante mais dont le regard sassombrit quand arrive la nuit. Jai appris à me méfier de moi, de mon trop plein démotions toujours prêt à sortir mais que je retiens parce que je ne veux pas que les autres sachent. Jai appris que la nuit est mon pire ennemi parce quelle vient avec son cortège de cauchemar et de doutes. En ai-je fait suffisamment, ai-je bien fait, ne les ai-je pas abandonnés : Roberto, Marie, Ana, Hélène et les autres. Il parait quil faut que je loubli et que je passe à autre chose. Il parait aussi quil faut que je lâche toute la pression que je me laisse aller. Si je me laisse aller je me couche dans un trou avec mon chien et je nen sortirai que dans dix ans. Non, je ne peux pas lâcher, il faut que je reste debout. Ce nest pas tout de partir vivre de pauvreté avec ses frères africains et revenir fracassée, maintenant il faut assumer. Il faut assumer les cauchemars, les angoisses et les flash-back. Cest mon choix et je dois en supporter toutes les conséquences. Mes parents, mes frères et mes amis ne sont pas là pour porter ce que jai parfois du mal à supporter. Ils aimeraient bien pourtant, prendre un peu de ce fardeau mais je refuse. Elle a la tête dure la petite brunette. Les premiers temps jai cru que je ne men remettrai jamais, mais finalement je men sort plutôt bien. Demain je retourne à la vraie vie des vrais gens, avec le même appart et le même boulot, comme si de rien était. Comme si ces six mois de mission navaient été qun rêve. On me demande souvent ce que jai appris. Je ne sais jamais quoi répondre, jen ai tellement appris sur moi, sur les Hommes et sur Dieu, que je ne sais pas quoi répondre. Si un jour un beau brun ténébreux me pose la question je lui répondrai : « jai appris à dormir toute seule comme une grande, sans épaule chaleureuse pour me blottir. Mais jai aussi appris que cétait mieux avec. »
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La fièvre de lécriture est revenue. Je trouve ma vie moins intéressante ici quen Afrique mais comme le nombre de lecteurs ne cesse daugmenter, je continue. Je ne veux pas perdre mon lectorat. Aujourdhui pour ne pas perdre mes bonnes habitude jai fais les boutiques avec Sylvie. Comme tous les ans nous avons acheté le même manteau. Un très joli paletot que nous avons vu gris dans le magasin mais qui est violet en réalité. Comme il est bien coupé, ça ne fait rien on le mettra quand même. Un peu de futilité ça fait du bien, ça nettoie un peu lâme.
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Quinze jours, voici quinze jours que je suis rentrée en France. Je suis rentrée épuisée et désorientée. Je nai même pas eu la force décrire jusquà aujourdhui. Mes premiers mots sur ma terre natale : « Oh Putain ! » Quand le pilote a annoncé quil faisait beau, soit -1°C à Paris nous avons tous ri dans lavion. Quand je suis sortie sur la passerelle en chemisette jai beaucoup moins ri. Ce nétait pas très gracieux mais cétait une expression spontanée qui exprimait bien mon ressentit. Jaurai volontiers dit : « Fichtre quel froid ! » mais ce nétait pas exactement ce que je ressentais. « Oh putain ! Cétait plus juste. Ce qui était vraiment dommage cest que javais un coupe-vent mais je lavais oublié sur un siège de la salle dembarquement, dommage, je ne pouvais donc men prendre quà moi si je mourrais dhypothermie. A larrivée à Montpellier mon taxi mattendais mais pas mes bagages. Je suis donc restée en chemisette jusquau lendemain. Juste le temps de revoir le père Noël, de lentendre me dire quil ne « maimait pas assez » Dommage, moi je laimais tout court. Comme il me devenait impossible de rester chez lui pendant trois semaines, jai atterri chez un couple damis. Eux, ils saiment tout court, tout les deux et ils mont recueillis avec beaucoup de tendresse. Merci. Pour moccuper et que je ne perde pas la main, ils mont proposer de moccuper de Bambou, leur chien que jadore et que jai élevé au gâteau régime, qui sétait blessé aux pattes. Pansements matin et soir, un vrai régal. Comme je ne suis pas du genre à me laisser abattre par des grèves, un coup détat, un rapatriement au Sénégal, la perte de la moitié de mes co-équipiers, la peur de ma vie, une épaule luxée, des problèmes de santé et une rupture amoureuse, jai décidé quil fallait que quelquun soit châtié pour ma souffrance et mon désarroi, jai décidé que ma carte bleue serait immolée sur lautel de la consommation. Marre de vivre de pauvreté, marre de porter des boubous mal coupés, jai fait les boutiques et trucidé mon compte épargne. Après quelques jours, jai réunis mes forces et je suis allée chez ma mère où une surprise de taille mattendait. LAmour mais pas le mien. Quand je suis partie en mission il y a six mois ma mère ma demandée ce quelle allait faire sans moi, je lui ai répondu quelle allait vivre sa vie et samuser. Je ne savais pas à quel point javais raison. Le samedi suivant mon départ, elle a croisé un vieux copain de fac dans le train et depuis ils vivent le parfait amour. En une soirée je savais tout de Gérard et le lendemain jétais conviée à manger un aligot chez lui et à utiliser sa baignoire thalasso pour me détendre. User de ce genre darguments pour que jaille dans un endroit lendroit le plus reculé de France, cétait nul. Avec mon emploi du temps serré cétait impossible et en plus, comme jai passé trois jours dans mon lit chez ma mère, ce nétait pas pratique. Finalement, je suis retournée à Montpellier pour boire un verre avec mon prof de guitare à qui jai du annoncé que non seulement je navais pas fait de progrès mais que vraisemblablement javais régressé. Jai continué à faire les boutiques et le père Noël ma dit quil ne maimait vraiment pas mais quil voulait que lon reste amis. Je crois que jai eu tellement mal de je lui ai répondu des horreurs. Pour me consoler je suis allée voir mes anciennes collègues qui ne mont pas épargnées, dabord parce quelles trouvent que jai mauvais goût depuis mon retour et en plus parce quelles trouvent que je suis vraiment « abîmée ». Elles mont même obligée à rapporter une tunique dans une boutique sous prétexte que javais lair de sortir des quartiers nord. Après Montpellier, hier, je suis allée à Marseille pour faire les boutiques avec une autre amie. Je my suis acheter deux pulls en cachemire parce quil parait qua trente ans il faut absolument acheter son premier cachemire. Et ce matin direction Paris. Je vous évite le passage où je me suis énervée parce que personne de mon ONG nétait venu me chercher à la gare de Lyon et où je me suis perdue dans Paris. Je vous passe le passage où ma responsable de mission et moi avons faillit nous battre comme des chiffonnières avant la messe. Jai utilisé des méthodes de médiation que ma mère, médiatrice, mavait enseignée et le calme est revenu. Nous avons pu discuter sereinement comme des adultes. Il était temps. Je crois quils se sont enfin rendus compte que je navais pas trois ans et demi et que je ne disais pas que des conneries. Maintenant, je suis dans le train. Je profite dune place en première que je me suis offerte pour me faire du bien et surtout parce quil ny avait plus de place en seconde. Je mise beaucoup sur le train depuis que je sais que lon peut y rencontrer lamour. Jaime bien le train parce que lon voit de beaux paysages. Japprécie chaque petite chose qui fait que la France est la France et que la France est belle.
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Je viens de m’apercevoir que dans la précipitation de mon retour je n’avais pas fini l’histoire des cigares.
Le jeudi avant mon départ, soit la veille. Ana, Marie et moi avons étaient invitées par Philip et Anwar à manger de la gazelle, à fumer des cigares et à boire du cognac.
J’avais bien expliqué les règles à Marie et Ana. Il s’agit d’un rendez-vous amical. Pas de jupe, pas de décolleté et pas de situations ambiguës. On est en Afrique mais tout de même. Pendant la journée j’avais même donné un court de bienséance à Marie pour qui c’était la première sortie sans sa mère ou ses sœurs.
Conformément à ce que j’imaginais la soirée s’est parfaitement bien déroulée. Comme j’étais la seule à savoir fumer le cigare, j’ai initié tout le monde. Fumer, le foin et le divin en dédaignant le purin et ne boire du cognac que pour arrondir la bouche et pas pour se saouler.
Finalement, nous sommes rentrée chez nous et Marie a dit le lendemain dans la voiture :
-Avec toi j’ai beaucoup appris, j’ai appris à l’habiller, à sortir dans le monde, à porter des talons, à boire du cognac et à fumer le cigare.
-…Et bien, ne le dis pas trop à notre ONG, ils risqueraient de ne pas me renvoyer ici, parce que j’ai mauvaise influence sur toi.
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