• L’évolution de l’approche d’audit des fonds d’investissement

    Qui dit palmarès des SICAV (« Société d'Investissement à Capital Variable ») pense avant tout au rendement réalisé par les SICAV en question au cours d'une période donnée. Un rendement attractif et constant étant certes un des facteurs clé de succès d'une SICAV, il y a tout un ensemble d'autres facteurs, moins visibles pour l'investisseur, qui contribuent au succès d'une SICAV. Parmi ces facteurs, citons les plus importants, à savoir un réseau de distribution efficace, une information adéquate et compréhensible à la clientèle, un produit adapté à la demande du client, des prestataires de services spécialisés, un environnement législatif et réglementaire efficace et flexible.

    L'industrie des fonds d'investissement au Luxembourg semble rassembler toutes ces conditions, ce qui fait d'elle le deuxième centre mondial de fonds d'investissement derrière les Etats-Unis, avec au 31 mars 2005, 1.194 milliards d'euros d'actifs nets gérés. Cette position n'est certainement pas le fruit du hasard, mais le résultat d'un savoir-faire et d'une capacité extraordinaire des différents acteurs à anticiper les vrais défis et à réagir en conséquence.

    Que ce soit du côté des autorités pour transposer les nouvelles directives en droit national et garantir un environnement fiscal attractif, que ce soit au niveau des administrations centrales qui ont vite compris que les succès passent par la spécialisation, voire la consolidation ou que ce soit au niveau des promoteurs qui ont réalisé que la distribution paneuropéenne se réalise le plus facilement à partir du Luxembourg, dans un cadre multiculturel et au centre de l'Europe.

    Quelle a été l'évolution de l'audit externe des fonds dans cet environnement? Si la partie visible au public, à savoir le rapport de l'auditeur attaché aux états financiers, par lequel le réviseur émet une opinion sur l'image fidèle des états financiers n'a pratiquement pas changé au cours des dernières années, les travaux mis en œuvre par l'auditeur pour se former son opinion, à savoir l'approche d'audit, ont évolué significativement.

    Avec un peu de recul on peut dire que l'approche d'audit a suivi les tendances observées dans l'industrie en général.

    Tout d'abord l'audit des fonds suit, et ce à juste titre, le phénomène de la spécialisation mentionné précédemment. En effet, les produits visés par les fonds, deviennent de plus en plus complexes. Rares sont les portefeuilles qui sont composés à 100% de valeurs mobilières « plain vanilla » et dont l'évaluation ne pose pas de problème particulier. Aujourd'hui les portefeuilles sont composés de produits dérivés, structurés et autres, dont l'évaluation nécessite une formation particulière. De ce fait, les équipes de révision sont systématiquement renforcées par des professionnels spécialisés dans le domaine des produits en question. La consultation de spécialistes est, et le sera de plus en plus, la clé de succès d'un audit efficace.

    Mais l'approche d'audit des fonds a également été marquée par deux circulaires émises par la Commission de Surveillance du Secteur Financier.

    La circulaire 2002/77 «Protection des investisseurs en cas d'erreur dans le calcul de la VNI et de réparation des conséquences de l'inobservation des règles de placement qui sont applicables aux organismes de placement collectif » définit d'une part ce qui est considéré comme une erreur matérielle et d'autre part la manière dont le fonds, voire les actionnaires sont indemnisés lors d'un préjudice subi. La circulaire introduit le concept de matérialité, donc le seuil à partir duquel une VNI (valeur nette d'inventaire) doit être recalculée.

    D'autre part, la circulaire 2002/81 «Règles pratiques concernant la mission des réviseurs d'entreprises d'organismes de placement collectif », introduisant la nécessité pour les fonds de préparer un « long form report». Un tel rapport a pour objectif, entre autres, de décrire et d'évaluer les procédures de contrôle mises en place par les différents prestataires de services intervenant dans la production du produit final qu'est la VNI.

    Ces circulaires reflètent la volonté et la nécessité de ne pas uniquement se concentrer sur l'exactitude, en termes de chiffres, du produit final à une date donnée, mais de se concentrer également et avant tout sur les processus qui aboutissent à la production de ces VNI.

    Cette façon de voir les choses s'est traduite dans le domaine de l'audit en un basculement d'une approche substantive vers une approche basée sur l'identification des contrôles et les tests de conformité de ceux-ci. Pour obtenir son assurance, l'auditeur va non seulement valider des données chiffrées à une date donnée, mais il va aussi analyser les principaux processus de production de la VNI et les contrôles internes qui alimentent ces processus. L'auditeur cherche à avoir une assurance raisonnable que des erreurs éventuelles soient détectées par des contrôles internes efficaces en place avant que la VNI ne soit publiée et ce jour après jour.

    Cette approche est une approche axée sur le long terme et constitue le reflet d'une vision orientée vers le futur, étant donné qu'une validation de chiffres à une date donnée ne peut se faire qu'à posteriori. Cette orientation vers le futur est certainement un des objectifs visés par le «long form report».

    Il est vrai que le «long form report» a suscité des discussions ferventes au sein de l'industrie, surtout au niveau de sa fréquence, de sa longueur et de la charge administrative additionnelle qu'il engendre, mais il est important de ne pas perdre de vue cette nouvelle dimension qu'il introduit dans le domaine de la production des VNI.

    Il donne également une nouvelle importance au concept de matérialité/proportionnalité qui, pendant très longtemps, s'appliquait surtout à des données chiffrées. Le défi qui consiste à faire réfléchir les différents prestataires et surtout le management des fonds aux faiblesses matérielles de contrôles est lancé. Il sera le critère de différenciation qui fera, ou ne fera pas, qu'un fonds donné soit en mesure de s'inscrire dans le palmarès des SICAV. 

    Source :

    Nadia Faber, Ernst & Young Luxembourg .


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