• Un (premier) petit noir avec Georges Flipo

    Georges Flipo est un auteur issu du vivier des concours de nouvelles. Georges Flipo a publié en 2004 chez Anne Carrière un recueil de nouvelles intitulé La Diablada qui m'avait fait forte impression. Georges Flipo continue vaillamment sur sa lancée en publiant deux livres coup sur coup : un second recueil (L'Etage de Dieu) et un premier roman (Le vertige des auteurs). Georges Flipo tient un discours juste et lucide sur le milieu de l'édition. Georges Flipo se devait donc de finir accroché à mon tableau de chasse. Ce que j'ai fait, après lui avoir offert, comme à l'accoutumée, ce petit noir au coin du zinc. Il est à noter que cet entretien sera divisé en deux parties : la seconde, entièrement consacrée à la parution récente du premier roman de Georges, sera publiée dans les jours prochains.

    <?xml:namespace prefix = o ns = "urn:schemas-microsoft-com:office:office" /><o:p> </o:p>-          Tu es ce qu'on peut appeler un auteur tardif : peux-tu retracer les circonstances qui t'ont amené vers l'écriture ?
    <o:p> </o:p>

    -          Je suis un auteur plus que tardif puisque je croyais n'avoir aucune destinée littéraire (je n'ai, par exemple, jamais envisagé d'études de lettres). J'étais un matheux qui aimait les textes bien écrits. En 94, je découvre que mes enfants lisent des « livres dont vous êtes le héros ». J'en lis quelques-uns, je les trouve nuls (schéma simpliste, écriture pauvre). Pour m'amuser, j'en écris un gros, un livre de matheux au diagramme très compliqué ― ce qui m'amusait, c'était le diagramme, pas l'écriture qui n'était qu'un moyen. Pour l'anecdote, le thème était celui d'un petit collégien pensionnaire dans un collège dont les profs sont... des sorciers (5 ans avant Harry Potter ! J'en suis encore malade) Je ne l'envoie à aucun éditeur, jugeant le sujet ringard. Je découvre au passage que l'écriture m'amuse, puis je n'y pense plus. En juin 2002, accident de scooter qui va me pourrir mon été : vélo interdit ! C'est mon loisir favori. Pour m'occuper, ma fille me propose de participer à un concours de nouvelles (Espace-Icare Issy). Ça se passe bien, et je continue, peut-être plus par esprit de compétition que par passion littéraire. Ce sont ces succès, très relatifs, qui m'ont amené à l'écriture. Tu trouveras difficilement des auteurs qui ont eu moins de vocation que moi. 

    <o:p> </o:p>

    -          Comment s'est passée la publication de La Diablada, ton premier recueil de nouvelles ?

     

    -          Au cours de mes six premiers mois d'écriture, j'ai croisé dans les remises de prix quelques jurés (dont Serge Brussolo et Henri Vernes) qui m'ont incité à me faire publier. Je croyais à l'époque que c'était facile. J'ai préparé un recueil qui n'était ni fait ni à faire, je l'ai envoyé aux éditeurs parisiens... et Anne Carrière m'a dit oui, en me prévenant qu'il y aurait du travail de ré-écriture et de re-composition du recueil (elle n'aimait pas mes nouvelles méchantes parlant de l'entreprise). En phase pré-publication, j'ai beaucoup appris avec Anne et son équipe, j'ai découvert le grand écart qu'il y a entre un texte couronné par un jury de concours et un texte « littéraire » acceptable par un éditeur. Le niveau de finition demandé est très supérieur. J'ai appris à me relire, ce que ne font pas assez les concouristes, même bons. La publication s'est bien passée, bonne critique (Nouvel Obs, Le Monde, Marie-Claire, Marie-France, PPDA, etc.), plusieurs cous de cœur Fnac, mais les ventes n'ont pas dépassé la barre des 1.000 ex. Il paraît que ce n'est pas mal. J'attendais beaucoup mieux.

    <o:p> </o:p>-          Mais on clame partout que la nouvelle ne se vend pas et quelque chose me dit qu'Anne Carrière le sait : y aurait-il donc encore des éditeurs qui publient ce qu'ils aiment, avant toute considération commerciale ?
    <o:p> </o:p>

    -          Anne le sait maintenant. Le phénomène Gavalda était là : Anne se posait des questions et était prête à tenter une expérience « nouvelles ». J'ai émergé du sac postal et Anne m'a donné ma chance, car elle aimait bien la moitié de mes nouvelles. Il y a des éditeurs qui publient ce qu'ils aiment, en finançant ces amours par de l'édition pré-vendue. L'autobiographie de Lilian Thuram, publiée chez Anne au même moment, a probablement permis la sortie de La Diablada. Il y a aussi des éditeurs qui ont une stratégie extensive : la fabrication d'un livre coûte moins cher qu'avant, ils peuvent donc beaucoup semer (notamment ce qu'ils aiment) et regarder ce qui pousse. L'édition est devenue un immense marché-test. Je crois qu'aucun éditeur ne s'affranchit de considérations commerciales : les plus idéalistes ne cherchent pas à publier ce qui marchera sûrement, mais ne publient que les livres qu'ils aiment, en espérant leur trouver un public. Les plus cyniques aiment directement le public et essaient de lui trouver des livres que celui-ci aimera. Certains éditeurs sont à la fois cyniques et idéalistes.

    <o:p> </o:p>-          Tu fais paraître prochainement deux livres : l'existence de La Diablada a-t-elle facilité la publication des suivants ?
    <o:p> </o:p>

    -          Non, et ce fut une sale surprise. Première mauvaise surprise, je croyais être... disons attendu chez un grand éditeur qui avait bien aimé La Diablada. Ça ne donne rien après plusieurs mois d'attente. J'essaie ensuite une stratégie plus sélective : j'envoie à une quinzaine d'éditeurs un courrier me présentant (Diablada comprise), résumant mes deux manuscrits (un roman et un recueil) et leur proposant un envoi. Des bonnes remontées (uniquement sur le roman) du temps perdu, quelques commentaires sympa, rien à l'arrivée. Je reviens alors à la bonne vieille méthode de l'envoi sélectif par La Poste. Et le Castor Astral m'appelle.

    <o:p> </o:p>-          Penses-tu que les nouveaux réseaux de communication, l'internet, la toile des blogs, constituent une opportunité – comme une sorte de bouche à oreille virtuel – pour faire exister des livres comme les tiens, publiés chez de petits éditeurs et peu exposés médiatiquement ?
    <o:p> </o:p>

    -          J'ai du mal à répondre. D'abord, je ne considère pas le Castor Astral comme un petit éditeur : ses bouquins sont bien distribués (Volumen) et bien exposés, dans les Fnac, par exemple. Ensuite parce que la bonne exposition médiatique n'est pas gage de succès : j'ai eu, je crois, une bonne critique avec La Diablada  mais les résultats n'ont pas suivi. Alors, l'exposition dans les nouveaux réseaux ? Je ne sais pas ce qu'elle vaut, je les connais mal. Je suis vraiment à l'écoute de suggestions. On m'a conseillé de créer un site, je viens de le pondre : http://www.georges-flipo-auteur.com Mais concrètement, que dois-je en faire ? C'est là que je vois que je ne suis pas très pro comme écrivain. Je me sens encore Candide, presque imposteur. Qui peut m'aider, me conseiller ?

    <o:p> </o:p>-          Un Candide qui se débrouille plutôt bien... cela dit, tes trois livres sont édités par des maisons différentes. La finalité d'une démarche d'auteur n'est-elle pas de réussir à installer une relation de confiance, inscrite dans la durée, avec le même éditeur ?
    <o:p> </o:p>

    -          Oui, entièrement d'accord. Je souhaite être fidèle à mon éditeur, mais je veux aussi être fidèle à ce que j'aime écrire. Avec le Castor Astral, ça paraît bien parti, on verra ce que donnera ce premier roman, Le vertige des auteurs. La publication de mon second recueil, l'Étage de Dieu, par le Furet du Nord est un délicieux hasard dont le Castor est aussi heureux que moi.

    <o:p> </o:p>-          Je suis d'une nature généreuse : que puis-je te souhaiter pour l'avenir ?
    <o:p> </o:p>-          Merci pour cette générosité et pour ce café. Souhaite-moi d'avoir le courage de mettre plus haut la barre. De ne pas tomber dans la facilité, même si ça marche. D'écrire moins, mais mieux.
     

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