• Contrepoint, par Aldous Huxley (3)

    Salon victorien
    Il faut bien somme toute que j'évoque enfin le contenu de Contrepoint, roman polyphonique (ou pas) de Huxley, après avoir parlé de sa composition, de son genre, etc. (Voir ici et ici.)
    Le texte date de1926 et a été publié sous le titre original Point Counter Point. Il coupe une grosse tranche de gâteau dans une époque et un milieu, nous montre l'imbrication des nombreux personnages et des non moins nombreuses idées qu'ils portent et qui régissent leur comportement.
    Mais attention, c'est un milieu bien précis ! La classe dirigeante anglaise, au temps où l'Empire Britannique existait encore.
    On a donc là, disons, trois choses. Comment vivaient quotidiennement ces gens. Les débats d'idées politiques ou culturelles qui les animaient. Et une galerie de personnages précis, si précis qu'on ne manque pas de se dire qu'Huxley a dû piquer certains originaux parmi ceux qu'il connaissait.
    Mais je manque de renseignements pour savoir si le livre contient des portraits à clés. Et d'ailleurs ça n'a pas la moindre importance.
    Les héros variés et concrets vont d'Illidge le communiste qui finit, à force de théories sanglantes, par commettre un attentat contre un politicien d'extrême-droite, à Quarles le romancier qui ressemble à Huxley et qui est son porte-parole : un intellectuel un peu dépourvu du sens des sentiments.
    On trouve des dizaines d'autres personnages, parfois destinés seulement à énoncer des théories (c'est un roman à idées, voir ici), parfois hauts en couleur. Lucy par exemple, une dévoreuse d'hommes qui les collectionne comme un tranquille Dom Juan. Ou Walter, une de ses proies, tendre et manipulé par lui-même et par ses sentiments, qui a un boulet à traîner : Marjorie, une épouse qu'il a séduite, enlevée, avec qui il vit, qui attend un enfant de lui et est dépourvue de moyens de le quitter....
    Tous de ce microcosme lié à la haute société, avec des réunions mondaines, des théories scientifiques, littéraires, culturelles et artistiques, des coucheries, des cuites, des conventions et leur transgression.
    Bon, je ne veux pas faire un résumé des nombreuses intrigues qui animent le livre. Disons quand même que le roman est très intéressant.
    Un peu proustien en ce qui concerne l'ampleur, les tableaux des salons, les théories. Mais beaucoup moins sensuel, beaucoup plus intello.
    Une vasque fresque intéressante et un portrait tout à fait étendu de ce qui faisait mouvoir une époque dans les mœurs, les idées, les comportements.