• Nous sommes tous Rroms: recueillir l'héritage des héros

    de Roberto Malini, Gruppo EveryOne

    (texte traduit de l'italien)

    Le 16 Mai 1944 quatre mille Rroms internés dans le "Zigeunerlager" à Auschwitz ont décidé de s'opposer à leurs tortionnaires, qui selon le programme nazi étaient venus les conduire dans les chambres à gaz. La population rromani, réduite à des conditions pitoyables, composée d'une nuée d'enfants qui n'avaient plus que la peau et les os, et de femmes et d'hommes pieds nus dans l'enfer, se trouvait face à la machine de mort et d'oppression la plus puissante et organisée de tous les temps. Pourtant ils n'étaient pas hommes et femme prêts à baisser la tête devant leurs bourreaux en uniforme impeccable; les mains décharnées des enfants et des femmes se mirent à ramasser pierres, briques, lames rudimentaires et pauvres armes de fortune. Tous les Roms d'Auschwitz décidèrent de dire : "Non!" à l'inhumanité.

    "Non, nous ne vous donnerons pas nos enfants. Non, nous ne vous laisserons pas les évacuer en fume par vos cheminées. Vos médecins-tortionnaires ont déjà assez torture d'innocentes victimes, expérimentant leur science monstrueuse sur eux comme sur des rats. Leurs cris sont assez montés au ciel, encore plus haut que la fumée dense crachée par vos fours crématoires, encore plus haut que nos prières désespérées. Vous n'anéantirez plus nos familles, à qui vous avez enlevé liberté et dignité, notre trésor le plus si précieux. Nous ne laisserons plus à vos mains rapaces, à votre cœur macabre et à votre haine inhumaine, ni la beauté de notre vie, ni le caractère sacré de l'amour qui unit nos familles pauvres, mais fières. "

    Les mères serraient les plus petits contre leur poitrine, tout en luttant contre les bourreaux déchaînés. Les jeunes gens défendirent le "Zigeunerlager" jusqu'à ce que le sang ne les couvre, les rendant semblables aux esprits de vengeance des légendes. Les bras maigres brandirent jusqu'à la tombée de la nuit des armes rudimentaires dans un élan infatigable, jusqu'à ce que les SS se retirent, terrifiés devant cet héroïsme et ce courage surhumains qui dressait la chair nues contre les balles et les baïonnettes de la mort. Les SS se retirèrent, emportant avec eux de nombreux cadavres allemands. Ce n'est que le 2 août 1944 que les nazis - après avoir affamé les Rroms prisonniers de l ' "usine de la mort", en limitant au minimum leur subsistance alimentaire, réussirent par le massacre à liquider le "Zigeunerlager." Cette nuit là, 2.897 héros rroms furent assassinés en une nuit dans les chambres à gaz de Birkenau – administrativement pour "laisser la place aux martyrs juifs raflés à Budapest".

    Aujourd'hui, le 16 mai 2008, nous sommes confrontés avec les héritiers des bourreaux d'Hitler. Les auteurs du nouveau crime de masse sont ces hommes et ces femmes que nous voyons tous les jours sur les pages des journaux et à la télévision, souriant, plein de grands airs supérieurs, refaits par le lifting et le maquillage, la bouche pleine de mots qui sonnent si beau "légalité", " justice ", "sécurité ", mais qui sont détournés de leur sens et signifient en réalité "persécution ","racisme" et "mort ". Nous les voyons tous les jours et ils n'ont plus de couleur, pour beaucoup ils sont devenus transparents, unis dans la routine et uniformisés par la haine. Comme les nazis, mais cette fois avec "un visage humain" et "un langage politiquement correct", ils ne respectent rien: ni la vie, ni les Droits de l'Homme, ni les lois universelles, ni la nouvelle Europe faite pour combattre préjugés. Ils viennent d'inciter à la violence et à des pogroms dans toute l'Italie, ils ne cessent de tromper les masses avec des calomnies racistes et l'incitation à la violence xénophobe. Nous ne les arrêterons pas d'un coup, nous qui sommes encore assez clairvoyants pour voir la lumière des Droits de l'Homme. Non, comme à Auschwitz et bien souvent dans l'Histoire, le combat est inégal, nous savons maintenant que nous sommes tous des Roms, nous voulons être tous des Rroms parce que nous voulons être justes. Nous ne les arrêterons pas – dites-vous ? Pourtant nous croyons fermement que si, à condition de décider dès maintenant de nous ériger en héritiers de la fierté et de l'héroïsme des «tziganes» d'Auschwitz. A condition de nous combattre aux côtés des familles persécutées en remettant en question ces autorités déshumanisées qui ne représentent plus rien, ces uniformes qui ne signifient plus rien, ces plus hautes fonctions de l'État qui ont trahi toute valeur et toute humanité sous des prétextes de plus en plus cousis de fil blanc. De quelle légitimité réelle ces gens-là se réclament-ils lorsqu'ils fondent des actes et des décisions juridiques sur une identité ethnique ? Ont-ils le droit, ces gens-là, de prendre la parole au nom d'un peuple, d'une civilisation, d'une humanité, qui – au-delà de tant d'horreurs - a donné au monde un texte d'une insigne générosité, engagement magnifique à construire un avenir meilleur pour tout le monde: la Déclaration universelle des droits de l'homme.


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