• Un pote libanais, qui édite une revue locale sur la crise de l'identité française, m'a demandé mon point de vue après "l'intifada des banlieues".

    Pas grand chose à voir avec Biroute, mais j'ai plus rien de bien intéressant à raconter.

    Pistes de réflexion sur la crise de l'identité française.

     

    Parler d'une « crise » de l'identité française est désormais une lapalissade révélée par l'embrasement des banlieues.

    Pourtant, contrairement au message véhiculé par des médias qui, au nom de la sensation, ont tenté de faire passer Clichy-sous-Bois et comparses pour de nouveaux Baghdad, ces évènements ne sont pas le révélateur d'une faillite de la République, mais au contraire celui des conséquences dramatiques lorsque les principes républicains sont travestis. La crise de l'identité française était autrement perceptible dès le premier tour du scrutin présidentiel de 2002, dans lequel le vote extrémiste, de droite ou de gauche, avoisinait les 40%. De même, le rejet, en 2005, du projet de constitution européenne par 55% des suffrages est autrement plus inquiétant que les exactions d'une poignée de crapules encapuchonnées.

    Pour comprendre ce raisonnement, il convient de revenir sur la nature de l'identité française moderne, qui prend certes ses racines dans la Déclaration des Droits de 1789, mais dont la genèse ne se fera vraiment que sous la IIIe République et son considérable effort de scolarisation.

    Avant toute chose, rappelons le dilemme de Lamartine en 1848 : acteur majeur d'une Révolution qui voit l'avènement de la IIe République, il est toutefois consterné par l'optimisme de camarades révolutionnaires qui instaurent le suffrage universel masculin. Il pressent déjà qu'il est inconcevable de conférer le droit de vote à des masses ignorantes ne sachant ni lire ni écrire, car il réalise que le premier démagogue venu pourra emporter l'adhésion de la majorité. Ce que Napoléon III se fit un plaisir de faire avant de restaurer un Empire qu' il s'offrira même le luxe de bénir de l'onction populaire.

    Ce rôle capital d'instruction de la masse ne se fera que sous la IIIe République, grâce au zèle de ces désormais fameux « hussards noirs ».

    Ce bref rappel historique n'a d'autre but que de rappeler le caractère consubstantiel de l'éducation à la pérennité de la démocratie républicaine.

    Car si l'identité française est en crise, c'est que la République a progressivement renoncé à sa mission d'instruction populaire. Lorsque l' « Education Nationale » remplace l' « Instruction Publique », le principe est déjà travesti : « le vice entre dans la Cité avec la corruption des mots » (Platon). Si ce changement sémantique intervient en 1932, c'est 1968 et son psychodrame qui font passer le vice de forme au vice de fond : au nom de l'égalité, l'école devient progressivement un lieu d'éducation, et non plus d'instruction. Depuis cette date, l'évolution des manuels scolaires est celle d'un appauvrissement indéniable, dans le but de casser un savoir considéré comme réactionnaire, bourgeois, et maintenant ethnocentrique. Nos grands parents ont appris la langue avec Balzac, nos contemporains l'apprennent avec Titeuf et le style télégraphique, dont la présence même dans les manuels actuels est une insulte faite à l'intelligence. De plus, l'Etat confère plus aux personnels scolaires un rôle d'assistants sociaux que de professeurs, la démission et les lacunes des familles jouant aussi un rôle notable.

    Ce qui, au nom de l'égalité, donne une situation tout à fait contraire aux effets recherchés. Ainsi, aujourd'hui, la culture s'acquiert moins dans les écoles que dans les familles. D'où les inégalités criantes entre des élèves dont la meilleure chance d'instruction est le substrat culturel familial. Il faut ajouter à cela la scandaleuse démagogie du relativisme culturel, dont la saillie de Jack Lang reste la meilleure incarnation : « un graffiti vaut une symphonie de Mozart ».

    Ce n'est pas l'intégration républicaine, dont l'école est le moteur, qui est à blâmer, mais les politiques qui ont travesti son essence. Si l'identité française est en crise, c'est parce que son principe actif, l'école, a été abandonné ces trente dernières années, qui ont vu de surcroît le développement d'un urbanisme ghettoïsant, favorisant de facto le multiculturalisme plutôt que l'intégration. Ce qui est une deuxième trahison des principes républicains. Il est donc inexact de parler de crise actuelle de l'identité française, car elle est abandonnée depuis plus de trente ans. La trahison des Clercs de Benda paraît, sous cette lumière, comme un procès fait à une trahison minime, alors que les élites françaises ont maintenant vendu la République à la démagogie égalitaire.

     

    Voilà mon bon Hussein, je suis super rapide sur l'urbanisme, mais ça joue un rôle très important aussi, dans la mesure où il tend à condamner la mixité sociale. Je te laisse le soin de peaufiner ces réflexions vite faites à la cafète, faut encore que je me tape une fiche de lecture.

    Heureusement y'a de bonnes mesures comme le CV anonyme (bonne solution pour une France dont l'extrême droite est plus xénophobe que raciste, nuance de taille), le plan Borloo pour le logement (on casse les barres HLM pour les remplacer par des pavillons), ou encore la refonte de la carte scolaire (on arrête de concentrer tous les élèves à problème dans des bahuts de merde), etc..


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  • La tendance générale française est à la culpabilité néo coloniale, et quelques affreux à l'humour fleurant bon l'antisémitisme voudraient même faire payer la France sous prétexte qu'elle a pratiqué l'esclavage, bien qu'elle l'ait aboli il y a plus d'un siècle et demi.

    Je propose d'indemniser aussi les Vendéens copieusement massacrés après la révolution de 1792, ainsi que tous les descendants des Templiers massacrés par Philippe le Bel, voire même les descendants des Maures victimes du raciste Charles Martel à Poitiers, tant qu'on y est.

    Bref.

    Ici, l'esclavage moderne est une réalité, et il ne fait pas bon être basané. Soudanais, Philippins ou Sri Lankais, le marché est énorme. Une famille sur cinq possède un "Dooby", du nom de l'elfe de maison dans Harry Potter.

    La dooby coûte 1000 dollars à l'achat, des agences spécialisées affichent même les "Soldes" sur la devanture. Il va sans dire que ce pognon est pour l'agence, pas pour la victime qui, une fois arrivée, est payée 100 dollars par mois. Le "jour de congé" se passe à la maison, et de toute façon son passeport est confisqué dès l'arrivée. Faire le ménage, faire la bouffe et faire plaisir à Monsieur est son quotidien: une sur trois est maltraitée ou violée (faut dire aussi que la sri lankaise a un petit cul).

    Une amie black s'est d'ailleurs faite tabasser dans la rue, sans que personne ne lève le petit doigt, par un sympathique libanais qui pensait avoir affaire à une Dooby. Manque de pot, elle était française, et le scandale n'est né que de sa nationalité.

    Mon coloc, qui bosse chez Renault, a eu le malheur de faire une réflexion sur la qualité du ménage effectué par une dooby. Le lendemain, elle avait le bras cassé, "tombée dans l'escalier" bien sûr.

    Les thuriféraires de l'anti-France feraient bien de regarder un peu comment ça se passe ailleurs, avant de critiquer à bon compte un pays qui, plus j'y pense, est le meilleur.

    Je ne suis pas nationaliste pour deux sous. On me taxera d'ethnocentrisme, mais plus je vis à l'étranger, plus je suis fier d'être français.


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  • Appartements pas chers

    Au Liban, tout se sait: tout le monde sait tout sur tout le monde. Avant mon petit séjour chez les Services de Renseignements, j'y croyais pas. 7 heures pour une photo, ça m'a mis la puce à l'oreille.

    Intuition confirmée par une discussion avec une libanaise.

    Nous étions tranquillement en train de descendre quelques mousses chez cet inénarrable Khalou Samy, épicier rue Monot et père spirituel des Alcooliques Unanimes.

    Une croupe s'étant égarée un peu trop près de ma bière, je branche sa propriétaire. Charmante au demeurant. Un troupeau de touffes la rejoint, un pote fait un coup de foutdre sur une de ses congénères.

    Je me renseigne sur sa cible auprès de ma future-ex-conquête, histoire de voir s' il peut tirer un coup sans se faire égorger par la belle famille le lendemain.

    La bougresse se défend de lâcher la moindre information: "Non mais c'est ma meilleure copine, tu comprends, je vais pas te raconter sa vie..."

    "Eh oh tu peux tout me dire, je dirai rien je suis français".

    Il a suffi de la relancer une fois. UNE fois. Avec un argument aussi faible que ma francité qui plus est.

    Cinq minutes après, je connaissais la date de sa première copulation, ses problèmes de menstruation, et sa position préférée. J'en demandais pas tant.

    Elle ne connaissait pas cet adage fameux, "Motus et fouffe cousue".

    Toujours est-il que la maronite mérite bien de se faire désosser à coups de barre à mine.


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  • J'ai reçu quelques coups de fil inquiets de France, suite au post "La volonté d'une île". Je vous rassure, c'est un texte qui date de septembre, après qu'une bombe ait explosé à 200m de chez moi, faisant un mort et une vingtaine de blessés la semaine de mon arrivée. J'avais eu la chance de croiser Amin Maalouf avant mon départ, et il était extrêmement pessimiste sur l'évolution de son pays.

    Voir les bagnoles cramer, les gens courir, pleurer, hurler, un immeuble éventré et un quartier défenestré par le souffle de l'explosion, c'est autrement plus impressionnant que sur CNN et ça vous dégoûte sacrément.

    Depuis, les bombes pètent plus loin, et je n'ai pas revécu l'expérience, al hamdulillah.

    En ce moment, c'est plutôt des soirées hilarantes avec des débats fougueux entre un partisan de "l'autoritarisme consultatif ethnodifférentialiste", une militante qui "respire à gauche", un antisioniste convaincu, et un républicain centriste devenu sarkozyste par la force des choses. Bref, c'est animé et on se tape de bonnes barres de rire.

    On rigole moins avec la politique libanaise, vu que le seul type qui avait l'air de dépasser les clivages confessionnels, le général Aoun, a signé un document d'entente avec le Hezbollah, et qu'à son tour il se met à retourner sa veste au gré du vent, au point de rendre jaloux Joumblatt.

    La clé de la survie émotionnelle reste le je-m'en-foutisme, prendre tout ce bordel trop à coeur rend fou.

    Il faut mordre la vie à pleines dents, certes, mais sans s'en casser trop.


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  • Un dangereux criminel libanais

    J'ai passé un week end de merde. Mais vraiment.

    Vendredi soir, j'ai eu la bonne idée de déclarer ma flamme à la femme qui m'est chère. J'ai passé mon samedi à mariner dans une honte proportionnelle à l'incohérence de mes propos et l'inanité de ma démarche. Si tu lis ces lignes, je m'en excuse encore.

     

    « Heureusement », j'ai eu l'occasion de me changer les idées.

    Je rentrais paisiblement chez moi, vers 5h du matin, offrant la rue en pâture à mon appareil photo. Un militaire est passé dans le cadre. Pas le troufion de base en treillis, non, l'officier en uniforme.

    Jusqu'ici tout va bien.

    Sauf qu'il a rameuté deux soldats pour me courir après. Après quelques questions genre « qu'est ce que vous faites là » tout ça, ils m'ont livré à deux agents patibulaires, qui m'ont escorté au sein du saint des saints : la caserne militaire du quartier.

    Je me suis retrouvé brinqueballé entre différents bureaux, avant d'arriver chez le big boss local. Je remercie au passage l'incompétence de ses subordonnés, qui m'ont laissé manipuler mon Canon pour leur montrer ce qu'il y avait dessus : j'ai pu effacer le dernier film. Il restait malheureusement un trajet de taxi qui passe devant l'ambassade de France. Donc paf soupçon d'attentat, comme si j'allais filer la vidéo à Zawahiri pour qu'il y prépare une petite fête.

    Jusqu'ici tout va bien.

    Ils ont ensuite fouillé mon manteau, dans lequel s'invite toujours un nunchaku. Interminables palabres pour leur expliquer que c'est une habitude toute parisienne, qu' « en France, vous avez bien vu à la télé, c'est la guerre, c'est pas comme cette bonne ville de Beyrouth où tout est bien sécurisé ». Le plus drôle, c'est que l'argument a porté. J'ai ensuite dû fournir divers éclaircissements sur mes cicatrices, je vous passe les détails.

    Jusqu'ici tout allait bien.

    Mon titre de séjour correspond à une adresse vieille de deux mois, ce que j'ai bien dû admettre lorsque le big boss a appelé trois collègues, qu'il s'est levé, qu'ils ont ouvert une armoire, sorti des flingues, qu'ils les ont chargés et qu'ils m'ont dit : « Allez on va chez toi ».

    Oops. Une autre heure de palabres pour leur expliquer que je suis gracieusement hébergé par un pote, mais qu'il est rentré en France. Ils me demandent son nom, sa date et heure de départ pour vérifier tout ça avec l'aéroport, qui confirme. « Bon, alors on va chez lui, on veut ton ordinateur ».

    Là je commence à flipper sévère. Des films d'installations militaires et d'ambassades, j'en ai quelques kilos. Il était déjà 8 heures du matin. Serré entre deux molosses armés dans une voiture banalisée, on part sur les lieux. Ils rentrent dans l'appart, flingues devant. J'ai tenté de les détendre en leur expliquant qu'à part  de vieux caleçons mal rangés, personne ne risque de les agresser. Ca les a pas fait rire. On prend le portable et on repart.

    A 8h30, le type accepte de me laisser passer un coup de fil après avoir fouillé mon téléphone. J'appelle une nana du service social de la fac qui a le bras long, ça tombe bien, ils veulent que quelqu'un vienne m'identifier. Inutile de dire que je faisais pas le malin quand j'ai filé le code pour déverrouiller l'ordinateur.

    C'est là que  le miracle a eu lieu. Les types ont épluché tout ce qu'il y a sur ce blog, ont regardé des dizaines de vidéos de français tout bourrés, et ont miraculeusement slalomé entre les trucs compromettants, notamment les émeutes du 5 février où on voit les barbus brûler des bagnoles et lancer des cocktails molotov sur le consulat du Danemark.

     J'ai prétendu que les photos de chars viennent de l'AFP, et le plus dur a été de leur expliquer pourquoi je signe « OussamaBenLiquid ».

    10h30.

    La nana de la fac débarque. Elle voit 3 brûlures de clopes sur ma main gauche. Première question qu'elle me pose : « Ils t'ont torturé ? »...

    Reperquistion chez moi pour choper mon passeport dont ils n'avaient cure au début. La nana leur explique que je suis bien étudiant et que je ne menace pas la sûreté de l'Etat, encore quelques formalités, copie de ma carte numérique SD, vérification auprès de l'ambassade pour savoir si je suis un dangereux terroriste recherché. J'en voyais pas le bout, j'avais vraiment l'impression d'être dans un bouquin de Kafka.

     

    A 12h enfin, j'étais dehors et pure gratitude envers mon sauveur et ma bonne étoile. Finalement, je suis resté 7h au poste pour une vidéo banale, alors qu'en France ils m'auraient pris le chou pour le nunchak et l'adresse. J'en reviens toujours pas d'avoir eu autant le cul bordé de nouilles pour le contenu du disque dur, militaires et caricatures. Et je suis fasciné par la vitesse à laquelle la vie privée peut partir en couille ici, pas besoin d'appeler un juge ou quoi que ce soit pour se pointer chez vous et violer votre intimité physique et numérique. Et mon contact de la fac n'a pas tari d'éloges envers la « gentillesse » des militaires, parce qu'une arrestation ici est synonyme de passage à tabac, français ou pas.

     

    Je me suis promis qu'une fois rentré en France, il me faudrait une bonne raison pour en repartir.

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