• FAUST et le projet MANHATTAN

    A mon avis, deux grands "représentants" de  l'humanité moderne (c'est à dire nous tous) dans la littérature sont : Faust (mis en scène par bien des auteurs, dont Marlowe, et surtout Goethe) et Hans Castorp , le "héros" du grand roman initiatique de Thomas Mann : la Montagne magique (Zauberberg) écrit en 1924.

    On pourra me dire : oui mais ce sont des personnages d'oeuvres de fiction, qui n'existent donc pas ! comment pourraient ils "représenter" l'humanité moderne, qui est composée d'êtres humains en chair et en os ? encore Faust acquiert il peu à peu la consistance d'un véritable mythe, mais La montagne magique n'est qu'un roman... une grand roman certes, mais un roman parmi des milliers d'autres !

    Voire...

    j'oppose à ces allégations un avis tranchant, qui était d'ailleurs celui de Thomas Mann : loin d'être "seulement" des fictions, les mythes ont en fait plus de réalité que les faits et évènements (souvent dérisoires) du monde quotidien. Si, comme le dit le personnage de Shakespeare (et comme le répète le détective Sam Spade, magistralement interprété par humphrey bogart, à la fin du "Faucon Maltais" de John Huston) , "nous sommes de l'étoffe dont sont faits les rêves" , alors on peut commencer à concevoir que "le rêve dans le rêve" peut avoir plus d'importance que le rêve lui même !

    d'ailleurs le film "Picnic at hanging rock" (cf article précédent) commence par cette "récitation" d'une douce voix féminine : "ce que nous voyons et percevons n'est qu'un rêve à l'intérieur d'un rêve"...

    Sans être d'accord sur tout avec la "science spirituelle" d'orientation anthroposophique de Rudolf Steiner, je retiens certaines de ses intuitions géniales, notamment celles sur le sens de Faust; d'une manière générale je laisse tomber dans l'anthroposophie tout ce qui est manifestement trop imprégné de théosophie et d'occulte (les hiérarchies spirituelles, la réincarnation, l'Atlantide, etc...), ou plutôt je le considère comme des "mythes", pour lesquels joue ce que je dis un peu plus haut.

    Aussi ai je analysé le mythe de Faust dans l'article suivant en relation avec l'anthroposophie :

    http://www.blogg.org/blog-50434-billet-faust_de_goethe___la_rencontre_avec_le_mal-1068597.html

    "Faust est le représentant de l'humanité moderne; Hans Castorp de "La montagne magique" aussi, d'ailleurs il existe de profondes proximités entre les deux ouvres, ou plutôt les deux "mythes", car ce sont, comme le dit Thomas Mann au début de son oeuvre, des récits hermétiques. Dans tous les sens de ce terme.

    Oswald Spengler, dans le "Déclin de l'Occident", qualifie d'ailleurs de "faustienne" l'humanité occidentale.

    Que voulons nous dire par humanité occidentale ? l'humanité européenne ? l'humanité de race blanche ?

    non, mais l'humanité "moderne", celle qui se situe en héritage de l'évènement de la science moderne, l'évènement copernicien-galiléen-cartésien.

    Là encore, l'anthroposophie apporte un éclairage nouveau : car la période "moderne" coïncide avec celle de l'âme de conscience, qui commence selon Steiner en 1413. Un penseur important de cette époque, prédécesseur de ceux qui fondent la science, est Nicolas de Cuse."

    J'ai d'ailleurs aussi commencé à étudier, là encore en relation avec l'anthroposophie, "La montagne magique" ici :

    http://zauberberg.blogg.org

     quant à l'opposition tracée par Rudolf  Steiner, et fondamentale en anthroposophie, entre les deux "puissances du Mal" que sont Ahriman et Lucifer (reprise par Raymond Abellio dans "La structure absolue" avec le couple Lucifer-Satan)  elle est à mon avis d'une très grande importance, et d'une "réalité" qui là encore dépasse la réalité quotidienne qui est celle du "rêve ordinaire" (celle dont parle T S Eliot dans "La terre gaste", lorsqu'il dit : j'ai entendu la clef tourner une fois, une seule fois, dans la serrure").

    Cette opposition, c'est celle entre Settembrini (l'homme des lumières, de la révolte, du "placet experiri") et le jésuite Naphta (juif conveti) dans "La montagne magique".

    Dans Faust, l'opposition se situe entre le premier Faust de Goethe, où Faust est soumis à la tentation luciférienne , et le second, où devenu un personnage public rempli de "pouvoir" sur les hommes, c'est à la tentation ahrimanienne qu'il succombe...

    cette "réalité" suffit, si l'on admet ce que j'ai dit plus haut à propos de la force des "mythes" et plus généralement des entités "spirituelles" (les entités mathématiques en font partie, et que l'on songe par exemple à l'influence que peuvent avoir les espaces abstraits de Hilbert dans la physique quantique, et donc dans la réalité de tous les jours : GPS, ordinateurs, etc...pour ne pas parler des missiles nucléaires, j'y viens peu après).

    Donc pas la peine de se forcer à "imaginer" des dieux ou des démons : pour se "représenter" Ahriman, il suffit de former une image du web, ce "réseau" en "toile d'araignée" qui nous ensert dans des mailles de plus en plus serrées... Ahriman existe, il EST ses effets, pas un "démon" qui se cacherait dans un ciel inaccessible...

    Une autre "instance" de Faust, donc de l'humanité moderne, de nous tous, dont je veux parler ici, est à mon sens composée collectivement de ces scientifiques qui dans les années 40 ont participé au projet Manhattan.

    La photo qui accompagne l'article a été prise dans les années 40, elle montre trois génies de la physique ou des mathématiques (et même, dsions le, de la  fusion de ces deux sciences différentes : la physique mathématique) : au centre le physicien américain Richard Feynman, tout jeune à l'époque, il est né en 1918; il est entouré de deux très grands mathématiciens, à sa droite Ulam, à sa gauche Von Neumann.

    Tous trois sont juifs...

    c'est d'ailleurs un fait frappant de constater la prépondérance des juifs dans la physique de pointe de cette époque, et dans le projet Manhattan, dont le "directeur scientifique", Robert Oppenheimer, est juif aussi.

    http://en.wikipedia.org/wiki/J._Robert_Oppenheimer

    Voici la liste des participants scientifiques au projet :

    http://en.wikipedia.org/wiki/Category:Manhattan_Project_people

    parmi eux, on retient entre autres :

    http://en.wikipedia.org/wiki/Richard_Feynman

    http://en.wikipedia.org/wiki/Stanislaw_Ulam

    http://en.wikipedia.org/wiki/Le%C3%B3_Szil%C3%A1rd (Szilard)

    http://en.wikipedia.org/wiki/Edward_Teller

    http://en.wikipedia.org/wiki/John_von_Neumann

    http://en.wikipedia.org/wiki/David_Bohm

    aussi bien des "plutôt mathématiciens" (Ulam, Von Neumann) que des "plutôt physiciens" (Szilard, Teller) et Feynman ou Bohm, qui sont inclassables (mais inclassables de manière très différente : jamais Feynman n'aurait dialogué avec Krishnamurti).

    Tous juifs....

    quel est mon but en soulignant cette évidence ? de suggérer que les juifs seraient supérieurs aux non juifs en intelligence ? évidemment non !

    ou alors de prétendre qu'il y aurait une "influence juive" dans ce qu'il faut bien appeler le premier stade du terrifiant danger nucléaire global (plus terrifiant encore de nos jours que du temps de la guerre froide, où pourtant l'humanité est passée plusieurs fois à deux doigts du gouffre de la destruction totale) ? non plus !

    Car cette sur-représentation des juifs parmi les scientifiques américains de l'époque s'explique très simplement : ils avaient fui en masse l'Europe et les persécutions nazies. Dans la liste ci-dessus, seul Feynman est né aux USA (comme Oppenheimer d'ailleurs) : tous les autres sont des réfugiés d'Europe centrale, de Hongrie pour la plupart(alors va t'on en inférer que les hongrois sont plus intelligents que les tchéques ?) . A part peut être Von Neumann qui a émigré en 1930, donc avant qu'Hitler n'arrive au pouvoir (mais n'y avait il pas déjà des persécutions antisémites en Europe à cette date ?) .

    En 1939; ce sont Szilard, Teller et Wigner qui, épouvantés par l'idée (qui s'est révélée fausse par la suite) selon laquelle l'Allemagne nazie était proche de construction de la bombe atomique, ont persuadé einstein d'écrire à Roosevelt en mettant tout son poids (énorme à l'épqoue) dans la balance pour encourager le gouvernement américain à construire la bombe :

    "Les physiciens nucléaires Leó Szilárd, Edward Teller et Eugene Wigner (tous les trois des réfugiés juifs hongrois) étaient convaincus que l’énergie libérée par la fission nucléaire pouvait être utilisée dans des bombes par l'Allemagne nazie. Ils persuadèrent Albert Einstein, l’un des plus célèbres physiciens au monde et lui aussi un réfugié juif, d’avertir de ce danger le Président américain Franklin Roosevelt dans une lettre datée du 2 août 1939 dont Szilárd fit le brouillon. La lettre fait état de la possibilité de créer des bombes d'une puissance encore inconnue : « des bombes d'un nouveau type et extrêmement puissantes pourraient être assemblées. »

    Le texte laisse présager que la Belgique serait un précieux allié pour obtenir de grandes quantités d'uranium : « les sources les plus importantes se trouvent au Congo belge. »

    Einstein demande l'appui de Roosevelt, pour que le gouvernement « porte une attention particulière à la préservation de l'approvisionnement en uranium » et qu'il soutienne la recherche sur ce domaine « qui n'est à présent accompli que dans les limites des budgets des laboratoires universitaires ».

    Il fait part de ses craintes au sujet de l'Allemagne qui a mis l'embargo sur les ventes d'uranium tchécoslovaque, et où « le fils du sous-secrétaire d'État allemand, von Weizsäcker, est attaché à l'Institut du Kaiser Wilheim » qui travaille sur ces problèmes.

    La réponse de Roosevelt fut d’encourager des recherches supplémentaires sur les implications militaires de la fission nucléaire. Après le bombardement d'Hiroshima, Einstein déclara regretter amèrement d’avoir écrit cette lettre (I could burn my fingers that I wrote that first letter to Roosevelt).

    La marine de guerre américaine dut accorder une première subvention de 6 000 USD, gérée par le Comité consultatif pour l'uranium, pour des expériences sur l’énergie nucléaire, ce qui donna ensuite naissance au projet Manhattan."

     Einstein dut écrire à plusieurs reprises, voici les textes de ses lettres :

    http://hypertextbook.com/eworld/einstein.shtml

    Pour dire frontalement et brutalement ma pensée :

    ces physiciens ou mathématiciens, ces Savants-Philosophes (au moins pour ce qui est d'Einstein), juifs ou non juifs,  pris dans la tourmente de la guerre mondiale et du projet Manhattan, c'est à dire, il faut bien appeler les choses par leur nom, ayant d'une certaine façon "vendu leur âme au diable yankee WASP" (même si c'était pour de très nobles raisons), ils sont, collectivement, une incarnation de FAUST.

    FAUST, c'est à dire nous tous hommes modernes, FAUST écartelé entre les deux "puissances du Mal" que sont l'Occident ahrimanien et l'Est (soviétique ) luciférien. Quant au nazisme je ne sais pas très bien le classer.... peut être comme une des ces formes encore plus virulentes du Mal dont parle l'anthroposophie sous les noms de "Sorat" ou des "Asuras" ?

    toujours est il que le panorama spirituel de l'époque se présente à mon avis comme suit : avant les deux guerres mondiales, qui ont abouti à la destruction de l'Europe du centre, et donc de l'Europe (et de l'émergence dans les années 50 de sa négation sous une forme américanisée-mécanisée-ahrimanisée, sous la botte de laquelle nous nous trouvons toujours), l'Europe avait encore une chance  (faible sans doute , compte tenu de l'antisémitisme montant au 19 ème siècle) de réaliser son destin et de devenir ce qu'elle EST, dans une admirable symbiose entre judaïsme et christianisme !

    une jonction -fusion entre les deux entités dont des juifs allemands comme Einstein,  Husserl ou Cassirer donnent une idée de la grandeur possible; la grandeur de ce qu'aurait pu devenir l'Europe par cette symbiose judaïsme-christianisme, c'est à dire la grandeur de ce qu'elle EST "archétypalement", "éternellement", en tant que cette "patrie" spirituelle où l'Infini s'est fait corps et âme (comme recherche infinie de la Vérité au moyen de la science moderne, voir husserl au début de la Krisis)...mais une grandeur  perdue "temporellement" à tout jamais hélas.

    C'était d'ailleurs l'idée de Nietzsche, à qui l'antisémitisme (de sa soeur notamment) faisait horreur !

    Voir aussi :

    http://www.cfo.doe.gov/me70/manhattan/


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