• Claude Nougaro

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    Locomotive d'or,
    Aussi riche en pistons,
    Aussi chargée d'essieux
    Que de siècles un sépulcre,
    Locomotive d'or,
    Croqueuse d'un charbon
    Plus fruité, plus juteux
    Que l'est la canne à sucre,
    Locomotive d'or,
    Tchi ki kou tchi ki kou
    Sans un soupçon de suie,
    Sans une ombre de lucre,
    Tu me fis visiter
    Tes Congo, tes Gabon
    Tes Oubangui-Chari,
    Et tes Côte-d'Ivoire,
    Où de blancs éléphants
    M'aspergeaient de mémoire,
    Locomotive d'or
    Tchi ki kou tchi ki kou
    Locomotive d'or,
    Ka kan ka kan ka kan

    Je reluquais le rail,
    Assis sur ma valoche
    Et l'horloge vaquait
    Dans l'espace vaquant
    Le silence avouait
    Quelque chose qui cloche
    Quand soudain retentit
    La clameur de Tarzan
    Quand soudain j'entendis
    Un autre son de cloche,
    Tu arrivais enfin
    Du fond du cœur du temps,
    Tes plumes de vapeur
    Sur ta face de tigre,
    Tes faisceaux de sagaies,
    Tes boucliers de cuivre
    Locomotive d'or
    Ka kan ka kan ka kan

    Locomotive d'or,
    De bondir à ton bord
    Me donna même joie
    Qu'au sexe de la femme
    Mon corps ne m'aidait plus
    Qu'à survoler mon corps,
    Ma chair devint esprit
    Et mon âme tam-tam
    Oui, oui, tam-tam d'âme,
    Partout dedans! Dehors!
    Et de toutes ses dents,
    Succulente banane,
    Kenny Clarke riait
    Comme un enfant s'endort
    Comme un enfant s'endort
    Ayant vu un miracle,
    Comme un enfant s'endort
    Dans l'œuf ailé de Pâques
    Dans l'amour tournoyant,
    Locomotive d'or...

    Tout le monde va descendre
    Dans la gare divine,
    Dans la gare divine
    Le chef de gare est aimé,
    Dans la gare divine
    La locomotive d'or
    Va souffler
    Comme un enfant s'endort
    La locomotive d'or
    Comme un enfant s'endort
    La locomotive d'or...

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    Qu'il est loin mon pays, qu'il est loin
    Parfois au fond de moi se raniment
    L'eau verte du canal du Midi
    Et la brique rouge des Minimes

    O mon païs, ô Toulouse, ô Toulouse

    Je reprends l'avenue vers l'école
    Mon cartable est bourré de coups de poing
    Ici, si tu cognes, tu gagnes
    Ici, même les mémés aiment la castagne

    O mon païs, ô Toulouse

    Un torrent de cailloux roule dans ton accent
    Ta violence bouillone jusque dans tes violettes
    On se traite de con à peine qu'on se traite
    Il y a de l'orage dans l'air et pourtant

    L'église St-Sernin illumine le soir
    D'une fleur de corail que le soleil arrose
    Une fleur de corail que le soleil arrose
    C'est peut-être pour ça malgré ton rouge et noir
    C'est peut-être pour ça qu'on te dit Ville Rose

    Je revois ton pavé, ô ma cité gasconne
    Ton trottoir éventré sur les tuyaux du gaz
    Est-ce l'Espagne en toi qui pousse un peu sa corne
    Ou serait-ce dans tes tripes une bulle de jazz ?

    Voici le Capitole, j'y arrête mes pas
    Les tenors enrhumés tremblaient sous leurs ventouses
    J'entends encore l'écho de la voix de papa
    C'était en ce temps-là mon seul chanteur de blues

    Aujourd'hui, tes buildings grimpent haut
    A Blagnac, tes avions sont plus beaux
    Si l'un me ramène sur cette ville
    Pourrai-je encore y revoir ma pincée de tuiles

    O mon païs, ô Toulouse, ô Toulouse

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